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Les jeux de société : Le Signe des Anciens



Vous ne le savez pas, pauvres mortels, mais dans votre dos, d’innommables horreurs attendent leur heure, aidées par des humains serviles et avides de pouvoir. Des créatures indicibles, des Grands Anciens et autres monstruosités venues d’ailleurs. Et cette fois, elles sont bel et bien réveillées.

Tout le monde connaît ou a au moins entendu parler du Mythe de Cthulhu, compilation d’œuvres de HP Lovecraft et de ses héritiers culturels, et qui narre des histoires fantastiques ou horrifiques opposant de simples humains au Mythe, constitué de créatures monstrueuses aux pouvoirs colossaux, fort heureusement endormies (pour certaines). Le plus souvent, on y voit ces individus s’enfoncer dans la folie à mesure qu’ils découvrent l’horrible vérité, et si le style n’est pas toujours exceptionnel, Lovecraft a su restituer une ambiance oppressante, une réelle angoisse poisseuse autour de Cthulhu et de ses comparses, et quelques nouvelles ont obtenu un réel succès public (et tardif) comme « la musique d’Erich Zann », « le cauchemar d’Innsmouth » ou « Horreur à Arkham ».

Horreur à Arkham, quelle habile transition, était justement l’un des premiers jeux de FFG à ce sujet, et à ce jour l’un de leurs plus beaux succès. Riche de plusieurs extensions, passionnant, le jeu proposait à ses praticiens de devenir des investigateurs luttant, dans la ville d’Arkham, contre le réveil d’une monstruosité cosmique. Pour ce faire, ils devaient résoudre des énigmes, affronter les séides de leurs ennemis, en somme coopérer pour survivre avant de sombrer dans la folie ou de finir dévorés. Horreur à Arkham, pour beaucoup de joueurs, avaient néanmoins un handicap sérieux : entre une mise en place de une à deux heures selon le nombre d’extensions retenu, et des parties allant de 3 à 6 voire 8 heures, il était exagérément chronophage, et il était très difficile pour beaucoup de trouver l’opportunité de faire une partie.

Reste pourtant que l’idée de départ était excellente. FFG s’est donc demandé comment ramasser Horreur à Arkham dans une durée plus convenable, et c’est ainsi qu’est né Le Signe des Anciens.

1 à 8 investigateur(s) (mais oubliez le jeu en solo, horriblement difficile) pénètrent dans le musée d’Arkham, attiré par des phénomènes étranges. Ce qu’ils vont découvrir va dépasser de loin leurs angoisses les plus folles, car un Grand Ancien va se réveiller, et ils sont les seuls à pouvoir l’en empêcher.


Le sort du monde dépend d’elle. On est foutus.

 

Au départ, chaque joueur choisit, au hasard ou non, un investigateur. Chacun a un score de point de vie, de santé mentale, un équipement et une compétence qui lui est propre. Ensuite, on choisit un Grand Ancien qu’il faudra affronter, chacun ayant, là encore, un effet négatif sur le jeu, et des règles spéciales pour le combattre. On pioche enfin les six premières salles du musée que l’on pourra explorer, et le jeu commence.

Le principe, en réalité, est fort simple : à son tour, un investigateur peut aller visiter une salle. Pour ce faire, il doit résoudre les tâches inscrites sur la carte, dans un ordre imposé ou pas selon le cas. Pour ce faire, il lance 6 dés, et doit les faire correspondre avec une tâche. Il isole alors les dés victorieux, et lance les restants pour tenter de réussir les autres tâches. S’il échoue pour une tâche, il défausse un dé, peut en mettre un de côté, et retente sa chance. Pour couronner le tout, chaque lancer ne peut accomplir qu’une tâche. Si un seul lancer vous permet d’en remplir plusieurs, vous en choisissez une, et relancez le reste des dés, en espérant accomplir à nouveau les autres tâches de la carte…


Ici, la flèche indique un ordre de résolution imposé.

 

A la suite de cela, deux hypothèses. S’il triomphe, il obtiendra divers bonus : des possibilités de relance, de l’inventaire voire un signe des Anciens, la capitalisation de ces derniers permettant de barrer l’accès au Grand Ancien. Parfois, il pourra aussi déclencher un effet négatif, comme l’arrivée d’un monstre dans le musée, ou l’ouverture d’une nouvelle zone hors de notre dimension, plus difficile mais souvent plus rémunératrice. Si un monstre apparait, il ira se placer préférentiellement sur une zone qui lui est destinée, remplaçant ou complétant une tâche préexistante.


Encourageant, non?

 

Chaque lieu et chaque monstre dont on triomphe est récolté par l’investigateur qui pourra, à son tour, l’échanger (au lieu d’une visite) contre des soins, des objets, voire des signes des anciens.

Enfin, après une victoire, on remplace le lieu dont on a triomphé.

En revanche, en cas d’échec, il déclenchera des effets négatifs : blessure mentale et/ou physique, monstre, mais surtout des pions du Destin, qui vont sur la piste du même nom. Parfois, cette piste fera apparaitre un monstre, mais surtout, si elle se remplit, le Grand Ancien se réveille…


Charisme, gentillesse: le voisin idéal.

 

Difficile, direz-vous ? oui, d’autant plus que certains lieux portent la mention terreur propre à chacun. Si, après un lancer de dé, vous ne remplissez aucune tâche et que l’un de vos dés affiche la face « terreur », vous subirez cet effet négatif, souvent détestable… D’autres lieux, enfin, porte un verrou, qui capture un dé jusqu’à ce que la carte soit vaincue…

Comment faire alors ? Et bien heureusement, vous avez vos compétences, toutes variées et différentes, même si certains personnages sont meilleurs que les autres. Vous avez aussi des objets, qui vous donneront des dés supplémentaires et meilleurs (le jaune meilleur que les verts, le rouge meilleur que le jaune), des sorts pour stocker vos dés, des alliés aux effets ponctuels ou des indices pour relancer vos dés…

Et rassurez-vous : si vous mourez, vous pouvez prendre un nouveau personnage.

Notez enfin qu’à la fin du tour de chaque joueur, l’horloge avance d’un quart de tour, et que quand elle a fait un tour complet, on pioche une carte mythe, aux effets tantôt négatifs, tantôt moins,  mais qui souvent fait avancer la Piste du Destin…

Si vous parvenez à accumuler assez de Signes des Anciens, le Grand Ancien est emprisonné dans sa dimension et vous êtes victorieux.

Supposons que, malgré tout cela, le Grand Ancien se réveille… Bon, là, autant vous le dire, vous êtes dans le pétrin. Tous les investigateurs sont placés sur sa carte et subissent son attaque… Les morts ne sont pas remplacés, et les survivants se mettent au travail : chaque Grand Ancien a une tâche qui lui est associée, et il faut la réussir pour le blesser (on ne peut pas l’accomplir qu’une fois par lancer). A la fin de son tour, l’horloge avance, et quand elle a fini sa révolution, le Grand Ancien attaque encore. Autant dire que la chose est difficile, et si Itaqua est jouable, Cthulhu ou Azatoth ne le sont pour ainsi dire pas… Ceci étant dit, à chaque fois que vous réussirez à accomplir la tâche, vous pourrez enlever un Point du Destin, et si vous les enlevez tous, vous aurez triomphé de votre ennemi en le repoussant, félicitations, vous pourrez aller prendre un repos bien mérité en établissement psychiatrique.


Au prix d’un tour complet, l’entrée du Musée permet de reprendre son souffle.

 

Comme souvent avec FFG le matériel est agréable à l’œil, les règles claires et riches, et le jeu plutôt complexe avec une excellente rejouabilité, le tout pouvant se jouer en 1h30 (plus 15 minutes d’explications de règles). Un excellent choix, donc, que l’on ne peut que vous recommander chaudement même si cet univers ne vous séduit pas.

 

A noter que le jeu a fait l’objet d’une adaptation sur iPad. Avec seulement trois grands anciens, des règles du mythe simplifiées mais une difficulté accrue, cela peut être une bonne occasion de jouer en solitaire.