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La BD du jour : Alisik de Vogt & Rufledt



Le repos des morts possède-t-il encore une valeur en ce bas monde ? Oui bien sûr mais peut-être pas pour tous… Lorsque le vieux cimetière du village qui nous est donné à voir dans Alisik se trouve menacé par des promoteurs immobiliers peu scrupuleux, c’est tout l’équilibre du rapport entre vie et mort qui se trouve chamboulé. Cela permettra peut-être aux vieux fantômes de partir au loin ou bien de se rapprocher des humains… Alisik où un regard différent sur le monde d’après !

Automne

 

Couverture Alisik

Triste de quitter ce monde dans lequel on vient juste d’entrer et qui peut s’avérer cruel envers les plus faibles d’entre nous. Alisik se réveille un jour, ou plutôt une nuit, dans un cimetière chargé d’âme(s), au propre comme au figuré. Même si elle ne conçoit pas encore la chose, elle se résigne bien vite à cette évidence terrible : elle est bel et bien morte ! Dans le petit cimetière où elle « vit » désormais elle fait la rencontre de quelques pensionnaires particuliers qui naviguent dans le monde réel avant de gagner d’autres cieux plus volatiles. La jeune fille essaiera de se rapprocher des humains pour repousser l’inéluctable mais, même si elle arrive à voir les gens qui crapahutent autour d’elle, la fillette constatera amèrement que l’inverse n’est point vrai… Elle décidera alors de connaitre un peu plus cet univers qui s’ouvre à elle. Entourée de Mamie, une vieille dame au triste passé, de Frings et de ces acolytes, elle apprendra les règles de ce lieu étrange menacé par un projet immobilier bien plus lucratif que la gestion pompeuse de concessions dont plus personne ne réclame l’entretien. Au milieu de cette nouvelle vie qui peut prendre le temps de se développer, puisque le rapport au temps reste d’évidence bien différent lorsqu’on est mort, Alisik tentera de garder ses espoirs de jeune fille en fleur et tombera amoureuse d’un garçon qui parvient à l’entendre mais qui ne peut la voir car il est aveugle. Relation un peu boiteuse entre un spectre en tee-shirt rose et un jeune homme qui ne se meut dans le monde des vivants que par les sons qui lui parviennent et dont certains sont d’évidence faussés… Mais doit-on s’interdire l’impossible ? L’amour ne peut-il vaincre les montagnes les plus abruptes ? Non, bien sûr que non, sinon la vie et la mort serait bien tristes elles qui possèdent ce point commun de croire aux impossibles pour mieux nourrir le rythme qui les habitent…

Cette histoire sans prétention impose lentement sa touche. Si cela tient essentiellement dans un dessin où l’on distingue des influences à la Burton, il ne faut pas pour autant faire la fine bouche de la partie narrative qui, forte d’un découpage dynamique, impose des ruptures entre les passages poétiques qui ouvrent les chapitres, les scènes sentimentales ou nostalgiques qui germent çà et là et le reste de l’album. Dans ce contexte la jeune Alisik va poursuivre ses rêves et cette idée que la mort n’est pas un obstacle majeur au développement de l’amour qu’elle porte au jeune Ruben. Ce premier volet pose le contexte dans lequel se lisent plusieurs trames parallèles. Tout d’abord celle qui se fonde dans l’univers mystique ou macabre, c’est selon les goûts, du cimetière, celle qui expose le monde des vivants dans laquelle Alisik espère encore avoir un rôle à jouer et enfin celle qui prend naissance autour du projet de complexe immobilier qui va définitivement briser les liens fragiles qui réunissent encore les deux premières. Le format mini de l’album servit par une couverture qui attire le regard avant qu’il ne plonge dans ce récit fantastique de très bonne facture. Un récit assurément riche en perspectives !

Vogt & Rufledt – Alisik Tome 1 :  Automne – Le Lombard – 2013 – 14,99 euros