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La BD du jour : Broadway de Djief

Avenue mythique de New York, Broadway tisse tout un lot de fantasmagories attachées à son passé et aux promesses de l’instant présent. Les rayons du soleil à peine tombés, et voilà que s’illuminent ses façades toutes plus démesurées les unes que les autres qui offrent les perspectives de spectacles, comédies musicales, numéros de cabaret et  théâtres indépendants qui agitent les esprits et la sphère culturelle de la grande pomme. Un album riche par ses perspectives, son cadre et son intrigue relativement ouverte.

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BroadwayBroadway. Sa vie nocturne, faite d’une agitation incessante, de déraisons réjouissantes, de tout ce qui participe à différencier le jour, parfois triste et rythmé par son lot de nécessités matérielles, de la nuit et de son aura mystérieuse, de ses mythes alimentés par des faits divers et autres scandales politico-mafieux, d’une vie plus légère qui rompt radicalement avec ce que fut la mégalopole quelques heures auparavant. Broadway n’est pas qu’une avenue aussi longue soit-elle, elle n’est pas qu’un trait sur une carte, dans toute sa rectitude, Broadway est autre chose de bien plus magique, d’impalpable pour celui qui ne l’a jamais parcouru à la nuit tombée. S’y tisse des destins tous plus éphémères les uns que les autres. La vie de façade, avec son mélange délicieux de lumières qui se mêlent en attirant à qui mieux-mieux les regards qui ne demandent qu’à s’affranchir de tous les préconçus, trouve en effet un écho moins noble dans ses contre-allées sombres et graveleuses, dans des lieux parfois glauques où il est toujours risqué de se perdre. Passer de l’aube au crépuscule, de la lumière flashy des enseignes gigantesques qui s’élèvent à des hauteurs démesurées à l’ombre des ruelles perdues qui les jouxtent.

Les hommes et les femmes aiment à se perdre dans ce monde outrancier, pour y jouer un rôle, exposer aux yeux de tous leur face cachée, celle trop longtemps contenu depuis le petit matin et qui laisse planer tout un lot de supposés plus ou moins arbitraires le soir venu. Les hommes de la nuit, les femmes aussi, gangsters, écrivains avides de sensations fortes, jazzmen courant les miséreux cachets offerts par des patrons obnubilés par l’argent qui coule à flot tout comme l’alcool interdit qu’ils injectent dans des corps assoiffés, prostituées ou femmes faciles, femmes fortes ou riches héritières, femmes de la scène qui soulèvent leurs robes et exposent leurs tétons tout sourires dehors sachant que ce faisant elles rendent fous les hommes venus dépenser les billets chèrement gagnés quelques heures auparavant, et jusqu’à une faune invisible susceptible de nuancer la folie de la déraison pour rappeler l’éphémère d’une vie placée dans une époque entre-deux guerres, une époque pas lumineuse pour un sou, dans laquelle pointent les affres à venir, avec sa crise économique et la lente plongée dans l’incertitude.  

Dans cet univers vaporeux deux frères vont tenter de faire revivre le cabaret de leur frère récemment suicidé. Ils ne sont pas du métier et accumuleront sans surprises les erreurs en hommes du jour peu versés qu’ils sont dans les vérités de la nuit et de l’engeance qui s’y meut. Fanny King, elle, fille de la nuit, a parcouru les clubs s’en pouvoir se poser en raison de son caractère insoucieux et de la malchance qui la suit voire la précède avec quelques mètres d’avance. Les trois se croiseront, et tisseront la réussite ou la perte du Chapman’s Paradise, le club maudit qui traine une réputation obscure.

Dans le premier volet de Broadway Djief pose un cadre. Celui de cette avenue de New York devenue égérie de la nuit débridée et décalée, mystérieuse et riche de promesses. Il déroule ensuite un récit dans lequel les personnages, un brin décalé avec l’ambiance des lieux, ne semblent pas fait pour émerger de cette mouvance. Pourtant de leurs maladresses, de leur naïveté nait l’incertitude, celle qui pourrait tout faire basculer d’un côté comme de l’autre. Le dessin maitrisé autant dans ses angles de vue que dans ses perspectives est servi par des couleurs chaudes qui, si elles manquent peut-être de ruptures, nourrissent une ambiance qui est celle de notre imaginaire associé à cette avenue. Un diptyque qui devrait ne pas laisser insensible ceux qui portent à cette période des années 20 américaines une vénération doublée d’un brin de nostalgie. A suivre !     

Djief – Broadway T1 – Soleil – 2014 – 13, 95 euros

 


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