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La BD du jour : Winter Trauma de Simon Hanselmann (Misma)



C’est la sinistrose puissance 10 dans l’appartement de Megg et Moog. Et pour cause, depuis le départ de Owl qui finançait le loyer à hauteur de 80 %, nos deux amis se trouvent dans l’obligation de trouver les ressources nécessaires pour survivre. Volet sombre mais aussi subtil de la saga mythique de Simon Hanselmann.  

Dire que Megg, Mogg et Owl s’est imposée comme la série BD la plus barrée du moment, n’est qu’un doux euphémisme. Primée à Angoulême en 2018 dans la catégorie « série », les aventures de nos trois héros, une sorcière verte, un chat obsédé et un hibou sympatoche, oscillent entre trash, désillusion, irrévérence et une grosse once de rigolade. Petit clin d’œil à une série de livres jeunesse écrits dans les années 70, Meg and Mog, qui narrait déjà les aventures d’une sorcière, d’un chat et d’un hibou, la version déclinée par Simon Hanselmann puise dans le terreau social des années 90 et postérieures, pas forcément tendre avec sa jeunesse. Des jeunes qui se questionnent sur ce No future qui se profile, issu d’un capitalisme qui laisse sur le côté sans aucun remords, de plus en plus de monde. Megg et Mogg, et à un degré moindre Owl, qui endosse la casquette de la raison du trio, passent leur journée sur le canapé à regarder des séries débiles, à boire et à fumer tout ce qui peut se fumer pour peu que les effets soient immédiats, durables et transportent loin.

L’appartement qu’ils occupent en co-location, crasseux, supporte des volutes improbables, dues aux aliments pourris qui s’y trouvent, aux flots de vomis ou de selles molles expulsées sur le sol par l’un ou l’autre, et au manque criard d’hygiène général. Même si les situations sont souvent répétitives, un humour décalé se niche dans chaque scène, contrepoids nécessaire à la sinistrose ambiante. Dans Winter Trauma, lassé par l’immaturité de ses colocataires qui ne participent pas ou peu aux frais généraux de cette fragile vie en commun, Owl, notre hibou bonne poire, a filé loin. Son départ coïncide avec un essai de reprise en main de Megg qui, en plus de relancer une psychanalyse, tente de réactiver ses droits aux allocations. Mogg, lui, fait le tour des boutiques avec un CV sur le dos dans le but de trouver un job. Rien de bien folichon mais une prise de conscience qu’il faut changer les choses, d’autant plus que la chambre laissée vacante par Owl est maintenant occupée par Werewolf, dealer à ses heures qui pousse loin les explorations trash les plus improbables.

Opus le plus sombre de la série, Winter Trauma permet, par un astucieux jeu de flashbacks, de mieux comprendre le passé de nos deux amis, qui explique en grande partie leur dégoût d’une vie sans relief qui ne demande pourtant qu’à se colorer, donc essentiel dans l’attente de nouvelles histoires qui verront peut-être le retour de Owl !

Simon Hanselmann – Winter Trauma – Misma