En cette année de commémoration les projets consacrés à la grande guerre foisonnent. On y trouve du bon, du très bon même, tant dans les fictions pures que dans les récits traités de manière plus historique, on y trouve aussi du moins bon. Rien de tel avec le projet de Maël et Vincent Odin. Nous connaissons tous le travail remarquable mené par le dessinateur sur Notre Mère la guerre, avec ce projet mené à partir des archives personnelles de la famille de Vincent Odin, il récidive en offrant son style reconnaissable fait tout à la fois de poésie, de noirceur mais aussi d’espérances. Un projet à découvrir d’ici quelques semaines que nous vous dévoilons en avant-première sur MaXoE !
De rencontres improbables naissent parfois des projets singuliers. Entre les lignes de Maël et Vincent Odin pourrait bien être de ceux-là. Leur album qui mixe fictions, tableaux, dessins et éléments d’archives de la première guerre mondiale trouve une place à part dans l’édition traditionnelle des récits de guerre. Cela est d’autant plus intéressant que les projets pullulent en cette année anniversaire et que la routine narrative aurait pu gâcher le potentiel des archives personnelles de Vincent Odin, puisque, il convient de le noter, la base documentaire provient d’un fonds remarquablement conservé par la famille de celui qui officie d’habitude comme graphiste pour les éditions Daniel Maghen.
A la base de ce projet, une proposition d’exposition de la galerie Daniel Maghen faite à Maël, dessinateur remarqué de Notre Mère la guerre (Futuropolis). Puis tout s’enchaine. L’auteur dispose déjà de quelques tableaux et dessins mais Vincent Odin note le rapprochement que suggèrent les visuels avec son histoire familiale, et notamment celle de son ancêtre, lieutenant durant la grande guerre. L’idée de réunir les deux hommes non pas sur un catalogue d’exposition classique mais sur un projet bien plus ambitieux voit le jour. Pour Maël, qui a déjà consacré nombre d’années à travailler sur Notre Mère la guerre, travailler encore le sujet en BD aurait pu entrainer une forme de lassitude compréhensible. Envisager le sujet en s’appuyant sur une histoire réelle richement documentée, pouvait par contre s’inscrire comme un nouveau challenge. Pour cela il fallait bien sûr que le fonds d’archives soit singulier, qu’il ne contienne pas les traditionnelles photos, ou documents classiques déjà entrevus ailleurs, les carnets de route maintes fois compulsés par les auteurs de tous bords. Les archives de la famille de Vincent Odin répondaient à ce critère et notamment par le biais d’un carnet rédigé soigneusement par le lieutenant dans les tranchées. Ce carnet établissait une liste de l’armement utilisé lors du conflit pour mieux l’appréhender ou mieux lutter contre s’il était employé par l’ennemi. Le carnet se fait dès lors manuel à usage des troupes massées dans la tranchée, pense-bête pour l’officier pour prendre les bonnes mesures dans des contextes où la réactivité reste bien souvent synonyme de vies épargnées. Le carnet constitue pour les deux auteurs la trame, la colonne vertébrale qui va structurer l’album et articuler les récits qui y prennent forme. Les nouvelles se tissent ainsi autour de cet armement : grenades, fusils, gaz toxiques… tout en reproduisant en préambule des fac-similés du fameux carnet. Des pages et double-pages de toiles de Maël complètent cet épais album de plus de 100 pages à sortir en novembre. Un projet nouveau par son approche, singulier dans son traitement qui apportera un plus à la bibliographie consacrée à la Grande guerre, notamment par la proximité qui se tisse ici avec les soldats, un tout du moins, le fameux lieutenant, et la dramaturgie qui découle de la lecture de ce cahier qui arbore les techniques de guerre et de tueries massives… Dans l’attente de la sortie de l’album et d’une chronique plus complète nous vous laissons en compagnie des auteurs qui nous dévoilent un peu de ce beau projet !
Maël et Vincent Odin – Entre les lignes – Daniel Maghen – 2014 (à paraître en novembre)
Interviews des auteurs