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La résilience. Un sujet fort pour une BD habitée.
Jung et le vol du Phoenix, l'interview et la chronique !

La vie n’est pas toujours ce long fleuve tranquille que l’on espère pourtant pouvoir traverser tous. Le dessinateur et auteur complet Jung avait abordé dans Couleur de peau : Miel, le sujet difficile de l’adoption et de la recherche identitaire. Il nous revient autour d’un projet qui veut sonder le processus psychologique que l’on nomme résilience. Un sujet fort pour un auteur attaché à l’écriture de ces destins et ces moments de vie pas si simples qui peuvent traverser chacun de nous.  

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Le Voyage de Phoenix de Jung – Soleil/Quadrants (2015)

Aron et Helen forment un couple d’américains typique et a priori heureux, sauf qu’ils ne peuvent avoir d’enfant. Après bien des années, de papiers à remplir et d’accords à obtenir, ils se rendent enfin en Corée du Sud pour y adopter un jeune garçon prénommé Kim. Arrivé à l’orphelinat américain de Séoul, Aron et Helen sont mis en rapport avec Jennifer, une jeune fille à la petite vingtaine particulièrement aimé des enfants qui va leur présenter celui qui deviendra leur fils. Le premier contact entre le garçonnet et le couple américain n’est pas des plus évidents. Le stress et l’angoisse du couple adoptant laissent pourtant place à de meilleurs moments. Porté par son naturel et l’envie de plaire aux enfants, Aron se met très vite à distribuer, dans des mimiques grossières amusant les enfants, des bonbons à qui veut. Et ils sont plutôt nombreux à adhérer au principe. Jusqu’à ce que Kim, intrigué ne se rapproche de celui venu spécialement pour lui et que le dialogue s’installe enfin : Toi aussi, t’en veux ? Tiens Kim… Celui-là je l’avais gardé spécialement pour toi. Le contact passe enfin et Kim accepte l’évidence de ce changement radical de vie pour rejoindre les Etats-Unis. Un pays que la jeune Jennifer, qui a perdu la trace de son père, militaire engagé dans la guerre de Corée bien des années plus tôt, et qui a trahit son pays en passant à l’ennemi, vient de quitter pour tenter de le retrouver. Les destins se croisent, s’entrechoquent parfois, le plus simple, qui devient parfois le plus dur, restant encore de vivre. Et puis un jour quelconque, alors que les indicateurs paraissent pourtant être au vert, survient un élément extérieur qui vient remettre en cause le bel – et fragile – agencement des choses… Et tous les espoirs entrevus, tous les bonheurs vécus ou à vivre, tous les piliers de l’équilibre s’effondrent soudainement. Le plus dur sera de refaire surface, de (re)penser malgré tout à la vie, de se reconstruire et d’avancer malgré tout…
Cette idée de reconstruction que l’on nomme résilience, Jung qui en rappelle le principe sur la jaquette de couverture, l’a déjà creusé en partie dans son précédent projet, Couleur de peau : Miel, qui se déclinait en quatre volumes autour de sa propre histoire d’adoption. Ici l’auteur a pris pour parti de construire une fiction qui se nourrit du thème de l’adoption et qui creuse ensuite les rapports compliqués avec l’autre, avec les évènements extérieurs qui peuvent se rencontrer dans chaque histoire personnelle et qui nous mettent au défi. Aron devra ainsi composer avec une souffrance extrême lorsque arrivera un accident à son fils encore fragile et innocent. Jennifer elle, en tentant de retrouver la piste de son père, traitre parmi les traitres, découvrira peut-être le passé pas si simple de l’homme et le mal profond qui l’a frappé un jour près de la DMZ, cette zone tampon censée séparer les deux Corées. Jung prend le temps de creuser chaque destin. Il le dit et le revendique, pour lui le format du roman graphique, plus littéraire, lui convient désormais mieux qu’un autre. Il lui permet surtout de contrôler l’unité de temps, le déroulé de la trame et de jouer avec ces poses qui sont autant de volutes graphiques qui servent le propos, d’autant plus sur une thématique comme la résilience. Tout cela Jung le fait en tentant de décortiquer les attitudes possibles de chacun. Pour cela il réalise une véritable immersion dans l’âme de ses personnages dont il propose les possibles attitudes face à un destin pas toujours clément. Le dessinateur le fait avec une pudeur naturelle qui renforce le propos sans pour autant tomber dans un pathos qui le desservirait. On pourrait presque se laisser aller à dire que les brins d’histoires dévoilées ici ne sont que les supports de son attache à l’idée de départ de travailler et sonder la résilience. Un projet fort, dans la lignée des derniers travaux d’un auteur qui a des choses à dire…

Jung – Le Voyage de Phoenix – Soleil/Quadrants – 2015 – 19,99 euros

 

L’interview de Jung

 


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