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Mafia III : un gangsta paradise ?



mafia3-haut

mafia-iii-jaquette-571637c46d851Comme une pierre qui roule…

Vous incarnez Lincoln Clay. Comme vous l’aurez deviné, ce patronyme n’évoque ni la Sicile d’un Corleone ni le Cuba d’un Tony Montana. Non, Lincoln est le pur produit du melting-pot américain, un métis issu de l’union d’une latino et d’un Wasp puis recueilli par un père d’adoption afro-américain. Mais dans cette Amérique de la fin des années 60, toute personne vaguement colorée est invariablement qualifiée de « negro » et doit accepter d’endurer les insultes et les comportements discriminatoires. Ceci dit, Lincoln a du répondant. Fraîchement revenu d’un conflit vietnamien encore en cours, sa carrure n’a d’égale que son courage et notre jeune vétéran n’est franchement pas du genre à se laisser marcher sur les Rangers ! Et cela tombe bien puisque sa « famille », au business franchement pas très légal, est en grande difficulté. Sous la coupe de la mafia italienne dominée par le clan Marcano et affaibli par une guerre ouverte contre les Haïtien, le mentor de notre héros semble fatigué et singulièrement dépassé. Ses affaires en pâtissent donc dans des proportions inacceptables et les talents de Lincoln vont rapidement être mis à contribution.

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Tout ce background est méticuleusement mis en place à l’aide de « cut scenes » dont le moins que l’on puisse dire est qu’elles s’avèrent classieuses. C’est sans doute le plus gros atout de Mafia III. Le jeu regorge de personnages charismatiques excellemment interprétés et servis par des dialogues souvent savoureux. Quant au personnage principal, loin d’être basique et binaire, celui-ci affiche une personnalité complexe oscillant entre une profonde humanité et un désir de vengeance puis de contrôle qui le pousseront aux pires exactions. Et oui, la vie de mafieux n’est pas exactement placée sous le signe des anges ! De fait, Mafia III se suit comme un véritable long-métrage doté d’une réelle qualité d’écriture. Sans déflorer une intrigue très bien ficelée et émaillée d’épisodes dramatiques particulièrement intenses, sachez que Lincoln sera amené à venger son clan puis peu à peu à décimer les gangs locaux pour devenir le seul maître de New-Bordeaux. Au risque d’y perdre son âme comme nous le rappelle régulièrement le personnage du prêtre veillant de près sur celui qu’il considère comme son propre fils.

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New-Bordeaux : un bon cru ?

Oui j’ai osé !  Mais puisque nous abordons le sujet du cadre de cette aventure, attardons-nous un peu sur cette ville dont le nom n’est pas sans évoquer la Nouvelle-Orléans. De fait, New-Bordeaux en constitue une version alternative et reprend fidèlement les codes et les clichés de la célèbre ville de Louisiane. New-Bordeaux offre donc une autre vision des cités américaines, à la fois moderne et délicieusement désuète. Les docks industriels et les quartiers d’affaires alternent donc avec des zones d’habitation plus archaïques sur le modèle du célèbre quartier français de la Big Easy. Et bien sûr, qui dit Louisiane dit marécages et cabanes insalubres au beau milieu de bayous inhospitaliers mais fort pratiques pour se débarrasser de cadavres encombrants. Les Alligators ne sont franchement pas regardant sur la qualité de leur déjeuner et constituent de parfaits complices lorsqu’il s’agit de faire disparaître sans une trace l’une de vos victimes. SI vous ajoutez à cela un  contexte sociétal parfaitement retranscrit avec les tensions raciales et politiques qui secouent cette américaine en pleine mutation, on se dit que l’on tient là un parfait terrain de jeu pour un GTA-like. Oui mais…

Le métro, boulot, dodo déprimant du gangster de base

Certes, le background de Mafia III est des plus alléchants mais force est de constater que l’expérience ludique proposée est très décevante. Pour commencer, New-Bordeaux est loin d’avoir la classe d’un San Andreas. Et oui, il fallait s’y attendre, difficile de ne pas tester ce GTA-like sans le comparer systématiquement à la référence du genre. Là où Rockstar proposait une ville et même ses lointains alentours avec un souci de détail et une diversité d’environnements hallucinante, les développeurs de Hangar 13 livrent aux joueurs une map bien plus restreinte sans pour autant être plus dense. Plus gênant, peu de zones flattent le regard et beaucoup de lieux que vous serez amené à visiter sont calqués les uns sur les autres. On a bien du mal à supporter ces innombrables intérieurs d’entrepôts proposant des couloirs d’une austérité certes réaliste mais terriblement monotone. Exit les panoramas à vous faire chavirer la rétine et vous poussant à la capture d’écran, Mafia III n’est pas un très beau jeu. Un point c’est tout.

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Cette lassitude liée à des environnements peu inspirés se retrouvent malheureusement à travers un gameplay assez convenu et particulièrement répétitif. Mafia III propose donc un mix très classique de conduite dans de multiples véhicules achetés ou « empruntés » et des phases d’action sollicitant vos compétences largement développées en tant qu’ancien GI. Désirant se démarquer de la concurrence, le jeu souhaitait apparemment ne pas négliger la possibilité d’infiltrer les zones à nettoyer, la plupart du temps des locaux occupés par des gangs rivaux. Lincoln a donc la possibilité de se mettre à couvert et de supprimer discrètement des gardes qui mériteraient franchement de rendre visite à leur médecin ORL. En effet, l’IA de vos ennemis frise le zéro absolu et il n’est pas rare d’égorger un gardien à trois mètres de son compère sans que celui-ci ne s’en inquiète plus que cela. Lorsque l’alarme est déclenchée, vous aurez le choix entre deux options : vous cacher le temps que tout ce petit monde soit frappé d’amnésie et reprenne son train-train quotidien ou bien sortir l’artillerie pour des gunfight qui restent au demeurant assez sympathiques. Notez bien que le jeu ne fait pas dans le dentelle question hémoglobine. Mafia III est un jeu adulte pour public averti.

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Le problème, en dehors de l’IA défaillante évoquée plus tôt, c’est que la qualité d’écriture du scénario ne se retrouve pas franchement dans les différentes missions qui vous sont proposées. Celle-ci sont répétitives et seuls quelques épisodes anthologiques viendront heureusement rehausser le niveau d’ensemble. Sinon, on enquille les combats ad nauseam dans des niveaux toujours aussi « plats ». Quant à la conduite des véhicules, elle reste correcte en termes de sensations mais n’est que très peu mise en valeur. Il s’agit juste de faire des jonctions entre les zones de tir aux pigeons. Hormis quelques courses-poursuites avec les forces de police, on ne retrouve pas de missions purement dédiées aux engins motorisés comme on pouvait les trouver dans les GTA (et oui, encore…). Au fur et à mesure de votre progression, vous étendrez votre influence sur les différents quartiers de New-Bordeaux. Libre à vous de nommer alors un de vos colonels en charge d’administrer pour votre compte vos nouveaux territoires. Ces « capo » pourront également vous octroyer différents bonus ce qui intègre au jeu un petit fond de gestion pour le coup assez agréable…

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Pas loin de la sortie de route.

Mais il serait malhonnête de terminer ce test sans s’attarder un minimum sur les performances purement graphiques de ce Mafia III qui font largement jaser depuis la sortie du soft. Tout le monde s’accorde à dire que le jeu souffre d’une finition problématique avec de nombreux bugs graphiques qui altèrent l’expérience de jeu. Pour être tout à fait franc, je m’attendais à pire et les premiers patchs semblent avoir corrigé au minimum certains problèmes trop évidents. Reste que Mafia III souffre effectivement d’une réalisation plus que perfectible avec quelques collisions étranges, des comportements de véhicules erratiques et un niveau de clipping parfois hallucinant. D’un autre côté, l’environnement sonore est lui particulièrement soigné avec une BO qui fleure bon le Flower Power , le rock sous acides et la soul de la Stax. On ne peut pas tout avoir….

Par Phil

Testé sur PS4