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Until Dawn : souviens-toi vendredi 13



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Les jeux axés sur les QTE ou l’immersion sont au cœur de débats passionnés entre joueurs. Pour certains, ils sont une formidable expérience, immersive à l’extrême, prenante. Pour d’autres, ils sont le point zéro du gameplay, une proposition ludique inexistante, en ce qu’ils n’inventent rien en termes de mécanique ou ne mettent pas à l’œuvre la sacrosainte skill.

Loin de moi l’idée de tenter de convaincre l’un ou l’autre des camps. Néanmoins, l’erreur fondamentale semble être d’avoir voulu présenter ces oeuvres comme l’avenir du jeu, alors qu’ils sont clairement l’avenir du film.

Tout repose à la fois sur le concept et la technique. De plus en plus, les consoles permettent un affichage photo-réaliste exceptionnel, brèche dans lequel s’était engouffré par exemple un LA Noire, en faisant avec plus ou moins de réussite un socle de son gameplay. C’est parce que la technique a évolué que l’on a pu avoir Heavy Rain, qui est et reste l’une de mes expériences ludiques les plus bluffantes. Il ne s’agit donc pas d’un jeu hyper narratif, mais bel et bien d’un film extraordinairement interactif.

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Naturellement, média comme possibilités créent un nouveau cahier des charges, mais le fond demeure.

Difficile de parler du scénario sans risquer le spoil, aussi nous nous en tiendrons à ce que tous ceux qui se sont un tant soit peu renseignés savent pertinemment, quitte à verser dans le lieu commun le plus éculé : Un groupe d’amis se réunit pour des vacances dans un chalet de montagne. Beth et Hannah, deux sœurs jumelles, suite à une mauvaise blague de leurs potes, sont frappées par un sort funeste. Un an plus tard, les amis se réunissent pour célébrer la mémoire des deux jeunes femmes. Mais ils ne sont pas seuls sur la montagne.

Bon évidemment dit comme ça le pitch est vraiment d’un classicisme absolu, mais rassurez-vous, les twists arrivent.

Premier point : les auteurs connaissent leur sujet, et même un peu trop, puisque les fervents amateurs de ce genre de cinéma sauront y voir clair de temps à autre, même s’il faudra un petit moment avant que le puzzle ne se mette réellement en place. En revanche, le respect du genre colle à chaque minute du jeu, et il se suit comme un bon film d’horreur, bien réalisé et inventif.

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Et même mieux que ça, car si un film dure environ 1h30, le jeu, lui, dure un peu moins de 10h, ce qui est tout à fait respectable. Du coup, les développeurs ont eu le temps d’introduire chaque personnage assez longuement, de créer des tensions, des pulsions, et de faire de chacun d’eux un peu plus qu’une coquille vide. Et c’est bienvenu, puisque vous allez, tour à tour, les incarner, et tenter surtout de les faire survivre. Or, il m’est par exemple arrivé de m’attacher à un personnage que je pensais stéréotypé et qui ne l’était pas tant que ça, ou de laisser mourir, délibérement, un personnage qui me sortait par les yeux. Bien sûr, cela se paie par une exposition un peu longue, mais qui pose les bases du reste. En revanche, une mention spéciale à l’ambiance, posée très rapidement, et soutenue notamment par une bande-son absolument remarquable.

Le jeu créé une galerie qui sans être révolutionnaire est réussie, et cela implique, parfois, des dilemmes cornéliens, d’une cruauté terrible. Mention spéciale à Peter Stormare, dont le personnage est une première dans les jeux vidéo et se trouve être une adjonction absolument géniale.

Car survivre, c’est vraiment le mot. A travers des épreuves originales et visuellement bluffantes, ce que seul un jeu de ce genre peut permettre, il va vous falloir vous frayer un chemin, sachant que par la force des choses ce gameplay, aussi limité soit-il, permet toutes sortes de possibilités diverses.

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Autre excellente idée du jeu : les totems. Ce sont de petits objets que vous trouverez (en cherchant bien) et qui vous donneront un petit indice sur une mort éventuelle, une chance de survie ou autre. Malin. De même, de nombreux objets à collectionner vous raconteront l’histoire derrière l’histoire, et la totale découverte de l’une de ces collections conditionnera même la survie d’un protagoniste !

Le gameplay, d’ailleurs, parlons-en. La plupart du temps, il vous faudra vous déplacer, fouiller le décor, et c’est tout. En revanche, les phases d’action exigeront d’appuyer rapidement sur un bouton ou de maintenir la manette parfaitement immobile, alors même qu’elle tremble du fait par exemple des pulsations cardiaques de votre personnage du moment… Si les QTE ne sont pas très méchants, en revanche la manette immobile m’a coûté un perso de façon relativement injuste, et quand on s’embête à les faire survivre ça peut agacer…

De même, les dialogues vous donneront parfois le choix entre deux branches d’une option, parfois en temps limité.

De tout cela dépendra l’un des coups de génie du jeu : l’effet papillon. Chaque décision, chaque dialogue, se répercutera sur la suite de l’aventure, et pourra à terme causer la mort de vos protagonistes ! De manière très convaincante, en particulier grâce à une capture des visages exceptionnelle, vos personnages interagiront, se fâcheront, se soutiendront… Et, les bonus du jeu offrant, à mesure que l’on avance, une série de making-of, cela permet de vérifier à quel point les personnages sont ressemblants à leurs acteurs. Du reste, la technologie est maintenant tellement au point que les acteurs ayant eu tendance à surjouer en se disant que le produit fini « raboterait » leur prestation, on se retrouve parfois avec un jeu outrancier (légitimé aussi par le fait qu’il s’agit quand même d’acteurs de second plan). Mais dans les faits, l’histoire et la narration deviennent dynamiques, et nos actions ont un impact sur l’histoire, qui pourtant reste cohérente malgré, notamment, les morts. Et de tout cela découle un grand nombre de fins, même s’il faut tempérer cela. En réalité, de fins, il y en a 3 principales : tout le monde meurt, tout le monde survit (oui oui c’est possible) et seule une partie s’en sort, cette fin-ci donnant lieu à une séquence finale différente selon les cas.

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L’effet papillon est donc une excellente idée, hélas un peu balbutiante… Dans les faits, il n’y a vraiment qu’un personnage qui peut en mourir, et on s’aperçoit, au second run, qu’en réalité les situations dans lesquelles les personnages risquent réellement leurs vies sont très rares.

Mais pour cela, il faut faire un second run, lequel peut d’ailleurs être très court puisque l’on peut refaire chaque chapitre individuellement et modifier la trame générale en conséquence.

Et si l’on s’en tient au premier run, on devient le protagoniste d’un film d’horreur, qui n’évite pas son lot de « faisons deux groupes de un » et de scare jumps faciles, mais qui connait ses codes, les applique bien, et arrive à surprendre son monde. Et si vous ne le mettez pas trop à l’épreuve, l’effet papillon peut largement vous bluffer.