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Le Grand Méchant Loup, ou la véritable histoire des Trois Petits Cochons



Grand méchant loup Une

 

Le grand méchant loup affiche

Riri, Fifi et Loulou (ou Henri, Philippe et Louis) ne sont pas les castors juniors mais bien trois frères. Trois frères dont la mère (Marie-Christine Barrault) vient de faire un infarctus. Trois frères qui, sur le point de perdre leur mère, commencent à s’interroger sur le sens de la vie. Chacun se trouve alors confronté à sa manière au « Grand Méchant Loup », la possible perte de leur mère agissant tel un révélateur.

Le premier à s’y frotter est Philippe (Benoît Poelvoorde), le cadet, celui de la maison en bois. Marié (à Valérie Donzelli) et père de deux filles, il fait la connaissance de son loup sur son lieu de travail (le Château de Versailles) sous les traits de Natacha (Charlotte LeBon). Une jeune et belle actrice de vingt-sept ans, pétillante, pleine de vie et qui vient bousculer l’existence bien tranquille et rangée de ce quadragénaire en manque d’adrénaline.

Le benjamin de la maison de paille, Henri (Fred Testot), est le second à voir le loup. Frustré par un mariage (avec Léa Drucker) tout sauf heureux et trompant son ennui dans une forme de lubricité, il entrevoit enfin le bonheur lorsqu’il vient frapper à sa porte, sur son lieu de travail une fois de plus.

Délogés tous deux de leur maison respective, les deux frères en viennent à se réfugier chez leur aîné, Louis (Kad Merad), visiblement à l’abri du loup avec sa femme Victoire (Zabou Breitman) dans sa grande et belle maison de pierre. Du moins il semblerait…

Le Grand Méchant Loup Riri Fifi Loulou

La french touch

Bien sûr, ce Grand Méchant Loup n’est pas le film du siècle. Mais il est aux antipodes des comédies que l’on nous sert quasi habituellement (surtout aux États-Unis d’ailleurs, mais parfois aussi en France), à savoir un scénario inexistant, des répliques graveleuses ou encore des one man show de la part de la ou des têtes d’affiche.

Ici, les réalisateurs et scénaristes (même s’il s’agit du remake d’un film québécois) signent un long-métrage intelligent. Son sujet, celui de l’infidélité, aurait pu donner lieu à un humour plus que gras. Il y est au contraire subtil. Toujours bienvenu. Jamais excessif. De plus, il n’est pas omniprésent. Le film est loin d’être un enchaînement de gags sans fondement. Au contraire, il oscille entre le comique des différentes situations des trois frères et l’émotion de certaines séquences. A propos des trois frères d’ailleurs, aucun ne vole la vedette à l’autre. Il n’y a pas de performance comique histoire de s’accaparer tout le mérite. La distribution est équilibrée, chacun a son importance et personne ne cabotine. Pourtant, Kad Merad, Fred Testot et Benoît Poelvoorde ne sont pas les derniers lorsqu’il s’agit d’amuser la galerie. Mais là, ils sont tout en nuance, en sensibilité, en retenue parfois. Ils ne se cantonnent pas à un seul registre, ce qui est appréciable. A noter également chez les hommes la présence furtive de Denis Podalydès, dans un rôle tout à fait secondaire mais vraiment très bon et surprenant.

Malgré l’importance des trois frères, ces derniers ne font pas pour autant de l’ombre aux rôles féminins qui ont eux aussi leur importance et sont plutôt bien servis. Zabou Breitman est parfaite en petite bourgeoise sans histoire (ou presque). Léa Drucker est hilarante en fliquette coincée. Et Valérie Donzelli assez touchante dans un rôle tout en douceur, mais finalement pas dupe des agissements de son époux et qui ne se résigne pas à sa situation. Toutefois, la mention spéciale revient à Charlotte LeBon qui est… Ouha ! Voilà quoi. Elle est pétillante, sensuelle, sexy, drôle. D’un naturel à couper le souffle. Complètement délurée. Elle est la dose de fraîcheur du film. On comprend aisément que Fifi / Philippe succombe à son charme et à sa jeunesse. Mais elle n’est pas pour autant le « Grand Méchant Loup », contrairement à ce que l’on pourrait croire…

Le grand méchant loup Lebon

Mais qui est donc Le Grand Méchant Loup ?

Pour ce qui est du scénario, il s’agit effectivement d’un énième film sur l’adultère, la crise de la quarantaine, le démon de midi ou tout autre expression du même genre que l’on rapporte à l’infidélité. Mais grâce à l’adaptation très libre du conte Les Trois Petits Cochons, ce film ne tombe pas dans la banalité. On y trouve même une certaine originalité avec les passages oniriques des trois frères se réfugiant dans les bras de leur mère (dans le coma) afin de lui demander conseil. L’originalité vient également de la parabole du loup venant déloger les deux premiers frères de leurs maisons de bois, puis de paille et qui partent se réfugier dans la maison de pierre du troisième pour y échapper. Alors qu’en réalité, il s’y trouve peut-être déjà…

Ce loup est mystérieux. Car il n’est pas une femme. Pas plus que la métaphore de la tentation ou de l’interdit. Le long-métrage va plus loin, mettant nos trois personnages principaux à nu face à leurs choix. Car le loup représente en réalité le choix. Celui de prendre sa vie en main quitte à briser un certain confort, un certain équilibre pour tout recommencer à zéro, ce qui implique une part d’inconnu qui peut faire peur. Il est également celui du choix entre deux amours impossibles à combiner : l’un naissant, passionné, passionnel et qui permet de se sentir vivant à nouveau ; l’autre déjà plus serein, tranquille, mais peut-être installé dans une forme de routine dont on a envie de s’évader. Celui-ci reste tout de même construit sur des bases solides, autour d’une famille, alors que le premier, même s’il est tout aussi sincère, n’est finalement pas la vie souhaitée par l’un de nos trois frères. Pourtant tombé fou amoureux…