- Article publié sur MaXoE.com -


La BD du jour : La carte du ciel d’Arnaud Le Gouëfflec et Laurent Richard (Glénat)



Des ovni qui passent au-dessus d’un village a priori sans histoire. Voilà le début d’un récit prometteur qui va s’immiscer au plus près de la vie de trois jeunes lycéens de ce petit patelin passé à la postérité d’un journal radiophonique. Un trio lié par une amitié sincère qui va pourtant vaciller avec l’apparition d’une jeune prof remplaçante qui saura faire apprécier la philosophie aux garçons de sa classe…  

Parfois nos yeux nous jouent des tours au point de nous faire percevoir une réalité qui est tout autre. Pas mal de personnes ont observé depuis toujours des choses bizarres dans un ciel à la nuit tombée. Des phénomènes si étranges qu’ils pourraient valoir à celui qui les rapporte des qualificatifs pas forcément flatteurs. En France le CNES par le biais du Groupe d’Études et d’Information sur les Phénomènes Aérospatiaux Non identifiés (GEIPA) dresse un inventaire de ces témoignages recueillis au fil des ans. Si la plupart des observations peuvent être expliquées, d’autres le sont moins. C’est peut-être ce qui se passe lorsque des lumières sont aperçues au-dessus du petit village de Vallièvre, perdu dans une campagne quelconque. Les médias relaient très vite l’information au point de créer une petite agitation dans le lycée voisin où certains ados sont friands de ce type de faits divers.

Claire et Wouki sont amis depuis l’enfance. Jules quant à lui est venu les rejoindre il y a tout juste un an. Persuadé de l’existence d’une intelligence extraterrestre le jeune garçon s’est passionné pour tout ce qui touche à l’astronomie, finissant d’emporter Claire, qui l’aime secrètement, dans sa vision du monde. En classe nos trois amis approchent leur vieux professeur de philosophie pour connaitre sa position sur la possible existence d’une intelligence non terrestre mais ne trouvent en réponse qu’un cartésianisme de façade attaché à la robe. Un évènement a priori anodin va pourtant changer la donne de ce bel agencement des choses. Absent jusqu’à nouvel ordre le professeur de philosophie se verra remplacé par une belle blonde aux formes affriolante, à l’hypersexualité affichée, qui, par ricochets, va faire entrer Claire définitivement dans l’âge adulte…

Le ciel peut nous dire beaucoup de notre passé et encore plus de notre futur. Claire, Wouki et Jules vivent depuis un an pour tout ce qui touche à l’astronomie, n’hésitant pas à se retrouver au soir couché pour observer le ciel avec une lunette. Dans leur désir de croire ils seront bousculés par le matérialisme de leur nouvelle professeure de philosophie pour qui toute référence religieuse ou magique empêche les hommes de passer dans l’âge adulte, bloqué par ce qu’elle nomme le Syndrome de Peter Pan ou refus de grandir. Jules sera absorbé de plus en plus par les formes de la jeune femme s’éloignant de ses amis et de Claire qui de son côté ne souhaite pas abdiquer si vite. Elle prendra pourtant un choix lourd de conséquences…

Arnaud Le Gouëfflec excelle dans ce type de récit qui s’immisce au plus près des personnages. Avec un indéniable talent il décortique leurs actes pour les confronter à des réalités qui les dépassent parfois. Il sait surtout prendre le temps, ralentir le rythme pour s’attacher à des détails qui peuvent se faire invisibles au plus grand nombre mais qui possèdent pourtant tout leur sens. La jeune Claire reste attachée à la magie d’une jeunesse rassurante qui l’autorise encore de rêver. Par un jeu de circonstances elle va pourtant mettre un coup d’accélérateur à son passage dans l’âge adulte. Récit qui navigue entre nostalgie de l’enfance, fantastique et polar sombre, La carte du ciel possède une remarquable force d’attraction, dopé par le dessin expressif de Laurent Richard. Un dessin qui respire par le choix de ne pas charger en textes certains passages qui vivent par l’image. Une réussite sur toute la ligne !

Le Gouëfflec / Richard – La carte du ciel – Glénat