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Focus Papillon, le bagnard remis en scène par Sanseverino ! – La BD et l’interview des auteurs



Papillon n’avait rien du mauvais bougre. Même s’il affichait des airs de petit voyou des quartiers, d’autres diraient un profil de grande gueule, il voit son destin changer à la suite d’un fait divers qui le pousse direct vers les cachots de Cayenne. Sa vie durant il mettra un point d’honneur à fuir, faisant de lui le prisonnier le plus volatile de sa génération. C’est à partir de ses mémoires romancées que Sanseverino construit son dernier projet, qui voit son album musical s’insérer de belle manière dans un écrin dessinée par Sylvain Dorange et scénarisé par Cécile Richard. Naissance d’un projet avec une interview passionnante des auteurs !

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Sanseverino est Papillon

Sanseverino est Papillon de Richard, Dorange et Sanseverino – La Boite à bulles (2016)

Dans les rues de Paris, quartier des Poulbots, un homme et une femme poussent la chansonnette autant pour se faire plaisir d’une vie de liberté et d’insouciance que pour tenter de glaner auprès des rares badauds de passage une obole ou deux pour aller ensuite boire un verre dans l’un des troquets qui s’élèvent non loin de là. Nous sommes en 1929. Des années pas forcément évidentes pour tous et la crise qui se profile n’arrange rien. Et notre homme va faire l’expérience de ces années troubles en se trouvant malgré lui au mauvais endroit ou mauvais moment. Car dans les escaliers qui descendent du Sacré-Cœur derrière son passage un chansonnier des rues se fait trucider d’un coup de schlass dans la bedaine. Récupéré par la flicaille, notre homme se verra jugé par un tribunal déjà acquit à sa culpabilité. L’homme possède un brin d’arrogance et ce détachement aux choses. Aux yeux de tous et du président, il n’est pas seulement le coupable idéal, il est le coupable tout court… Et le voilà qu’il prend perpette avec un billet dans les cales d’un navire pas forcément tout tourisme pour Cayenne…
A l’origine de ce projet, l’envie de Sanseverino de nourrir sa musique et ses chansons d’un texte et d’un personnage bien campé. Plusieurs projets pouvaient prétendre décrocher le sésame de se voir adapté mais un seul y parvint : Papillon d’Henri Charrière. Le nom de Papillon parle forcément aux plus de 40 ans qui ont pu se plonger au début des années 70 dans le film éponyme avec, dans les rôles phares, Steve McQueen et Dustin Hoffman. On y découvrait un bagnard prêt à tout pour fuir le triste sort qui lui était réservé dans un des pénitenciers les moins sexy de ce monde, soleil et dépaysement mis à part. Ce personnage réel et haut en couleur, petit voyou à l’ancienne des quartiers de Montmartre et des alentours, fut accusé à tort de meurtre, du moins l’affirme-t-il à l’instar de la plupart des prévenus depuis la nuit des temps, et prit perpette. Si l’on se plonge sur ce mauvais fait divers, comme certains l’ont fait depuis, on constate effectivement que des zones d’ombres entachent le dossier d’Henri Charrière dans une époque qui se veut propice aux erreurs de justice. Une justice qui porte alors un bien grand nom au regard de ce qu’elle rend. Mais qu’importe car notre trublion n’a pas l’intention de moisir dans le cachot qui l’accueillera et l’évasion restera le fil rouge permanent de sa détention. A l’origine de ce projet, un nouveau champ de jeu pour l’univers déluré de Sanseverino qui, à partir de la biographie de Papillon himself, romancée juste comme il faut, offre quatorze titres qui s’insèrent dans la vie du bagnard pour en révéler toute la tension mais aussi toute la couleur. Un récit qui porte le sceau de l’aventure, des grands espaces, de cette mer, ou plutôt de cet océan infranchissable, et de toutes les tentatives de son héros pour fuir. L’album, qui pourrait se voir comme un fabuleux écrin pour le CD musical, se compose, sur la forme, de plusieurs chapitres construits autour des quatorze moments de vie choisis par Sanseverino, sans en être la simple mise en image, elles prolongent, complètent et enrichissent les histoires chantées. Au scénario et pour la première fois, nous retrouvons Cécile Richard, la compagne du chanteur qui pouvait, mieux que quiconque, capter ses intentions et les transposer en art séquentiel. Le dessin de Sylvain Dorange, se veut quant à lui totalement immersif. Le dessinateur a souhaité surtout travailler sur l’ambiance, les décors qui pouvaient enrober les récits proposés. Ça fonctionne plutôt bien dans un trait qui soutient l’état d’esprit du bagnard. Du grand art pour un projet pluridisciplinaire d’une redoutable force d’attraction.  

Sanseverino/Dorange/Richard – Sanseverino est Papillon – La Boite à bulles – 2016 – 24 euros

Entrevue avec les auteurs