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La BD du jour : L’Ascension du haut mal de David B



David B s’est imposé depuis le début des années 90 comme un auteur majeur de la communauté du neuvième art. Son style singulier reconnaissable entre mille vaut aussi par sa capacité à raconter des histoires. Dans L’ascension du haut mal, paru de 1996 à 2003, l’auteur nous propose une autobiographie poignante qui devenait essentiel de retrouver en intégrale…

L'ascension Une
David B

L’Ascension du haut mal de David B – L’Association (2015)

Lorsque David B s’attache à faire paraître à partir de 1996 le récit autobiographique de son enfance, il ne sait pas encore qu’il marquera les esprits des lecteurs et du monde de la bande dessinée. L’autobiographie n’est pas un sujet nouveau dans le neuvième art, car, comme en littérature, il est parfois plus facile de parler des choses que l’on connait, surtout lorsqu’il s’agit de traiter en substance d’un sujet lié à la maladie d’un proche (le frère de l’auteur en l’occurrence) et par extension des conséquences sur l’auteur en devenir. Pour autant le travail de David B s’impose par la mise à nue véritable qui en découle. Car l’auteur du Cheval Blême, en s’attaquant au sujet de l’épilepsie de son frère, décide de ne rien cacher de l’histoire familiale, une histoire qui pourrait apparaitre douloureuse au regard de ce qu’il nous offre sous son trait. L’immersion de ses parents dans la macrobiotique et la confiance démesurée qu’ils accordent à des gourous en vogue à cette époque qui fleurent bon le poisson avant de partir au loin, rattrapés qu’ils sont par la justice ou le fisc aurait pu déstabiliser David B, alors jeune garçon attiré par le dessin qui devient une valeur refuge avant d’être un nouveau mode d’expression et d’exhortation des tensions du moment. Pourtant de ces faits de vie matérialisés par nombres d’espoirs déçus et les multiples craintes suscitées par la maladie de Jean-Christophe, qui franchit de nouveaux paliers avec l’âge, David B va en faire une force pour son travail de création. Chaque scène de vie stimulant toujours plus un imaginaire et une transposition graphique des rêves et des humeurs du moment qui donnent lieu aux premiers dessins signifiants de l’auteur en devenir.
Décider d’écrire sur cette jeunesse bousculée par la maladie de Jean-Christophe devenait nécessaire pour David B. Il le fait en faisant appel à sa mémoire des scènes partagées dans une enfance qui devient de plus en plus lointaine. Les faits y sont donc consignés en partie plus par les sentiments et les émotions qu’elles ont suscités sur le moment, que par l’exactitude des faits dont certains ont pu s’effacer ou s’éroder avec le temps. Et c’est peut-être là que L’ascension du haut mal possède tout son intérêt et toute sa force. Car les six tomes aujourd’hui réunis dans un bel album broché présentent un parcours ET la construction de l’imaginaire d’un auteur. Sans le parcours, parfois dur et compliqué,  l’imaginaire n’aurait peut-être pas eu la même force, la même capacité d’analyse, la même force d’observation et le même talent pour rendre compte et partager. Cette série s’impose donc par sa force de suggestion et pour la compréhension d’un auteur essentiel du neuvième art. La réédition de l’intégrale (une première version avait été publiée fin 2011) de cette série par l’Association avec une nouvelle couverture rigide en couleurs permet de remettre en avant des planches essentielles d’un projet hors-normes.

David B – L’Ascension du haut mal : intégrale – L’Association – 2015 – 37 euros