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Le Coin du Polar : Au lieu-dit Noir-Etang de Thomas H.Cook



Cette semaine, je vous invite à découvrir ce livre de Thomas H.Cook, que nous avons déjà évoqué ici. Publié en 1996 aux Etats-Unis et en 2012 dans notre pays, il a reçu lors de sa parution aux USA le prestigieux Edgar Allan Poe Award du meilleur roman policier.

 

L’histoire

Au lieu-dit Noir-Etang se déroule en 1926 à Chatham, petite ville de Nouvelle-Angleterre proche du Cape Cod dans laquelle grandit Henry Griswald, le fils du directeur de la Chatham School.
Le jeune Henry n’a pour son père, et le style de vie rangé qu’il préconise, que mépris.
L’irruption dans sa vie de Mlle Channing, la nouvelle et belle professeur d’arts plastiques, va bouleverser à jamais son existence. Mlle Channing, installée dans une petite maison au bord du Noir-Etang, va nouer une relation avec Leland Reed, un professeur marié et père d’un enfant qui vit lui aussi autour de l’Etang.
Narrateur du livre, Henry va assister à la naissance de l’amour entre les deux enseignants, et jouer un rôle dans les évènements tragiques qui vont se dérouler à Chatham School et provoquer plusieurs morts.

Au lieu-dit Noir-Etang est un livre qui nous laisse dubitatifs.

Il s’agit d’un livre très bien écrit, avec un style au charme désuet. On pourrait presque croire à sa lecture, si l’on a aucune information le concernant, qu’il date de l’époque à laquelle se déroule son histoire, les années vingt.

Le point de vue du narrateur sur l’ « affaire » est  totalement subjectif, celui-ci étant non seulement amoureux du personnage à l’origine des «évènements» mais également en pleine crise d’adolescence à l’époque. Le problème est que sa vision biaisée de l’histoire, si elle est intéressante, se révèle à la longue un peu fatigante pour le lecteur.

Le jeune Henry est donc en pleine crise d’adolescence, rejetant son père et ce qu’il incarne, s’ennuyant ferme dans sa vie.
Il est tout émoustillé en voyant débarquer une belle jeune femme à l’air romantique et bohème, ayant connu les mystères de la lointaine Afrique et les charmes enivrants de la vieille Europe.
Le jeune homme romantique qu’est Henry va à la fois tomber amoureux sans se l’avouer de sa charmante professeur, et vibrer pour l’amour naissant entre elle et son collègue.

Mis à part les continuels rappels de l’auteur, à travers la voix du narrateur, nous annonçant que tout ce qu’il décrit constitue les prémices d’une abominable tragédie criminelle qui a détruit plusieurs vies, on a plutôt l’impression de lire uniquement une histoire d’amour (certes bien écrite) et non pas un roman policier.
Ainsi, on assiste à l’attirance qui croit crescendo entre Mlle Channing et Mr Reed et à la fascination d’Henry pour ceux qui incarnent pour lui des figures romantiques.
Le souci est qu’au bout de 300 pages, on n’a pas le début du commencement d’une intrigue policière à se mettre sous la dent (exception faite donc des « teasers » de l’auteur). Cette absence d’histoire criminelle est quand même assez gênante pour un roman policier, qui plus est auréolé d’un prix prestigieux.
On se prend même parfois (coupablement) à supplier intérieurement les personnages de commettre un crime (même un petit vol à l’arraché ou un simple acte de vandalisme), afin de pouvoir s’extirper pendant quelques pages au moins de ce qui n’est finalement qu’une simple histoire d’adultère racontée par un adolescent romantique des années vingt.

Rassurez-vous tout de même, un  élément criminel finira par surgir en toute fin de livre (mais qui de mon point de vue ne suffit pas à faire de ce livre un roman policier à proprement parler). Mais que ce fut long à venir !

Tout n’est toutefois pas à jeter dans ce livre. Il est très bien écrit, et l’on sent malgré ses nombreux défauts que son auteur a du potentiel, potentiel qui si l’on en croit la critique s’est visiblement exprimé dans ses romans suivants.

Une déception donc, et surtout comme je l’ai écrit plus haut un livre qui nous laisse dubitatifs, mais un auteur à qui, à l’occasion, nous donnerons une seconde chance.