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Margot la Folle – La vision des enfers, une BD détonante !



Le thème de la mort a souvent été un sujet d’étude, de crainte, de passion même, et ce à quelque niveau que ce soit. Au Moyen-Age en France, et même au-delà, la mort était partie intégrante de la vie et l’homme se devait de la préparer tout au long de son passage sur terre. Dès lors les récits les plus fabuleux se sont forgés, construisant des bestiaires et des légendes propices à l’imaginaire. En peinture, le paradis et son revers, les enfers, sont devenus de véritables sujets, pour attiser la crainte des hommes et les rapprocher de Dieu, donc de l’église. La peinture s’est largement inspirée de ces récits et des peurs qu’ils véhiculent. Ainsi Les Très Riches Heures du duc de Berry, livre d’heures élaboré au début du XVème siècle, aborde en substance les enfers, Hans Memling propose avec son triptyque Le Jugement dernier, l’une des œuvres les plus puissantes au travers de laquelle le Christ et Saint Michel répartissent les âmes entre le paradis et les enfers. L’enfer de Pieter Huys, conservé au Prado à Madrid, Le jugement dernier de Van Eyck ou encore Le Triomphe de la Mort de Pieter Bruegel participent à construire l’iconographie à partir de laquelle les hommes vont forger leurs craintes ou leurs espoirs…


 

Muriel Blondeau – Margot la folle – Glénat – 2010 – 56 pages – 14,99 euros

Margot la folle (ou Dulle Griet) est l’une des œuvres les plus énigmatique de Pieter Bruegel. Ce tableau représente une femme prenant la fuite en emportant un butin. Ce dirige-t-elle vers les enfers ? Personne ne le sait. Cette peinture a donné naissance à de nombreuses interprétations et contes et, malgré les recherches et l’intérêt porté à ce personnage, sa véritable identité n’a jamais pu être percée, ce qui donne une force symbolique encore plus forte à ce tableau du peintre flamand. La dessinatrice belge Muriel Blondeau a travaillé sur cette œuvre et offre avec Margot la Folle, une bande-dessinée atypique. Atypique par son format, carré, qui offre des possibilités nouvelles en termes de création graphique, mais aussi par son sujet, son renvoi constant à l’œuvre de Bruegel, qui trouve en la personne de Blondeau, une lectrice contemporaine qui émeut et interpelle. Le tableau du maitre est repris en fin de récit par la dessinatrice qui donne donc ici sa propre interprétation de l’œuvre. Mais revenons au récit contemporain. Margot et Marinus vivent sur des terres ravagées par la peste. Un troisième personnage est toujours en vie, Bokko. Voulant échapper au mal qui frappe le village où ils résident, ce dernier se met en tête de tuer Margot et son mari pour échapper au mal. Une flèche tirée en plein cœur de Marinus aura raison de lui. Mais Margot ne l’entend pas ainsi et elle se décide à ramener celui qu’elle aime, emporté au ciel. Le récit débute véritablement ici et propose une vision non seulement délurée, mais aussi foisonnante de détails sur les enfers. Le dessin se construit en superposition de couches, de textures, de couleurs. Les cases sautent ou s’entrechoquent. Plus de cette linéarité propre aux récits « classiques », mais l’appropriation par Muriel Blondeau de l’espace. Un espace sans cesse repoussé. Travaillant en fond perdu, le détail s’immisce dans les moindres recoins. Par sa composition et le rappel à l’œuvre de Bruegel (Les poissons géant, la tour de Babel…) la dessinatrice propose un récit d’une densité rare. Un one shot décapant, qui pousse à en savoir plus sur celle qui en est l’auteure…


Questions à Muriel Blondeau

Qui est Muriel Blondeau ? D’où vient-elle ? et quels sont ses centres d’intérêts ?
Je vais vous raconter une petite histoire :

« Je suis née à Cologne une nuit de printemps.
Première née d’un couple modeste, j’ai vu le jour au sein de l’armée.
Mon père était militaire de carrière et ma mère l’avait suivi dans son casernement en Allemagne.
Si mes parents en ont ressenti l’exil, moi, je ne connaissais de la Belgique que les rares week-ends passés à y retrouver des grands-parents au verbe exclusivement patois.

J’ai grandi dans les cités militaires: en-dehors, on parlait l’allemand, en-dedans, on commençait nos phrases en français et on les terminait en flamand. J’ai appris mes jurons dans les trois langues.
J’aimais les odeurs des toiles kaki et les biscuits des rations. Papa m’a fait faire un tour dans un char amphibie.

Et puis, à douze ans: mutation pour le Shape, à Casteau.
Mes parents, ravis: « Enfin le retour au pays! ».
Pour moi, la grande inconnue. Ensuite la mélancolie: »Mais je ne suis pas belge! »

Au Shape, on parlait l’anglais, j’ai complété mon répertoire de jurons.

A 16 ans, maman m’a dit:
– J’ai une excellente nouvelle pour toi.
– On retourne en Allemagne?
– J’attends mon quatrième enfant.

Au cinquième enfant, j’ai 21 ans et arrêté de soupirer pour le pays qui m’a vu naître.
J’étais belge sur ma carte d’identité mais je ne savais toujours pas pourquoi ça me concernait.

Et oui, il a fallu du temps, beaucoup de temps, vraiment beaucoup.
Pourtant, belge je l’étais, et bien de coeur.
Dès le début, mais je ne le savais pas.
Doucement les pièces ont pris leur place: papy chef porion au fond de la mine, mon autre papy sur la construction du port d’Anvers, deux papys résistants.
Mamy m’a raconté que son père avait participé aux expéditions en terre d’Afrique et que certains objets qu’il avait rapportés se trouvaient au Musée de Tervuren.
Mon arrière-grand-mère, elle, avait hérité des marionnettes du théâtre ambulant « La Fleur »… de son père. Comment pouvais-je savoir en jouant avec elles au pied de son poëlle crapaud?
Toute ma vie était belge jusqu’à mon enfance en Allemagne.

Lentement une certaine fierté.

Certains reconnaissent leur belgitude avec les ketjes du petit vingtième. Moi je me découvre amoureuse de mon pays aux côtés de Bob et Bobette. « Ti Jérôme essayer nouvelle force ». Ah oui, je suis fan inconditionnelle de l’esprit Vandersteen.

Aujourd’hui, une déclaration d’amour.

J’ai la quarantaine et un enfant. J’ai besoin de boucler la boucle, ça y est je le dis « vous savez, je suis vraiment belge ». Je veux griffer sur papier mon identité retrouvée. C’est ça l’histoire de ma Margot: m’émerveiller du ciel plombé de la mer du nord, de la drôlerie de Breughel l’Ancien, du parfum de nos bières, et du grondement de nos jurons. »

Mon histoire vous a plu ?

Nous vous connaissions plus pour vos illustrations. Margot la folle représente-il une nouvelle direction dans votre travail ?
Le crayon m’a poussé au bout des doigts en même temps que j’ai appris à galoper sur la surface de la terre. En sont témoins les nombreux meubles, murs, et même billets de banque égayés par mes croquis … autant de surfaces libres n’existant bien sûr que pour être recouvertes de dessins ! C’est du moins la vision du monde qui s’imposait à moi à 4 ans …
Ce qui me semblait naturel était que le dessin existât pour raconter. Je n’ai compris que plus tard qu’un plasticien ne crayonne pas forcément dans une optique de narration visuelle et que cet aspect-là était plutôt un bagage personnel.
La BD fait partie de mon travail depuis longtemps, mes histoires ont paru dans des journaux, revues,… jusqu’à mon premier long récit publié lors de mon jury de fin d’études.
Par la suite, effectivement, mes illustrations ont été fort demandées, et il m’a fallu un peu de temps pour pouvoir mettre au point un travail plus long comme l’est une bande dessinée et le placer. Casterman a été le premier éditeur « dans la cour des grands » à me faire confiance et à publier « Monstrueuse Parade », une histoire noire de Freaks à l’abri des tentes circassiennes. Un scénario de mon cher et tendre, Philippe Foerster. Cet album a reçu le Prix « Premier album » au Festival des Arts Graphiques et de la Bande Dessinée de Roubaix. « Margot la Folle »  est donc mon 2ème album, chez Glénat, cette fois-ci.

L’histoire de Margot la Folle est tirée d’un tableau de Pieter Bruegel que vous réinterprétez à la fin de l’album. S’agit-il de votre part d’un hommage direct ou indirect à ce peintre inclassable (vous faites par exemple d’autres références, dans votre album, au peintre avec la Tour de Babel, les poissons géants…) ? Pouvez-vous nous dire comment est né ce projet ? Vous êtes-vous documenté sur l’œuvre de Bruegel, sur l’époque ?
Bien souvent, le choix d’une histoire est le témoin d’un état d’esprit que l’on ressent suffisamment fort pour y travailler au moins une année. Ici, j’avais besoin de faire le point sur mon itinéraire personnel, mon histoire belge.  De plus, les images qui m’excitent sont celles qui ne se solutionnent jamais vraiment. Celles qui surprennent par leur inventivité, leur univers décalé, leur folie même… Breughel a cette puissance-là.
Son bestiaire est grouillant, son univers chaotique, pourtant dans ce chaos, chacun a l’air d’y avoir sa place… Mon choix du tableau des Margot repose sur cette fascination. On se demande quelle est l’histoire qui le sous-tend. Et malgré mes nombreuses recherches, je n’ai jamais pu trouver une version officielle de qui était Margot et de ce qu’elle « foutait » là, le regard halluciné, guerrière, à se précipiter vers la gueule de l’enfer ! Margot est aussi ma chouchoute pour une autre raison : c’est une femme. Pas une avec des seins en obus comme on peut le voir sur moulte couvertures d’albums, mais une qui est vieille, avec des rides, des cheveux en ficelles griffé de blanc, pas sexy, pas charmante, folle.
Quant à l’époque, elle regorge d’éléments à exploiter, la peste, les guerres, les vanités, les procès de sorcelleries, tout ce questionnement effaré sur le sens de la vie et de la mort qui arrive trop vite… Bruegel le traduit très bien.

Reproduction :  Margot la Folle – Museum Mayer van den Bergh – Anvers

Vous prenez une grande liberté par rapport à la BD « classique ». Ici pas de cases enchaînées sagement les unes après les autres mais un patchwork détonant, fait d’inserts, de ruptures, de superpositions, de mélanges de couleurs. La liberté créatrice est-il un de vos moteurs ?
C’est le but de cette collection « Carrément BD » géré par Paul Herman. Présenter une forme de narration plus créative.
Ma formation à la bande dessinée s’est faite dans un atelier de Dessin. J’étais un espèce d’électron libre qui voulait dessiner, oui, mais surtout qui voulait raconter des histoires par son dessin. Et mes professeurs étaient plus formés à exposer dans les musées qu’à démarcher auprès d’éditeurs… Mon approche du 9ème art a été imprégnée par cette vision du travail. Et je ne le regrette aucunement. Il correspond à mon besoin de « surprise », j’ai ainsi appris à raconter autrement. Le découpage particulier de cet album essaye de rendre compte de l’expérience du chaos que vit mon personnage, de ce monde mouvant qui n’accepte jamais de la rassurer par une routine. Ce qui est attendu n’arrive pas. Et ce qui arrive n’est pas imaginable à l’avance.

Le format de l’album est lui aussi assez « atypique », l’avez-vous choisi vous-même, et que permettait-il en terme de création graphique par rapport à un autre format ?
Le format carré est un choix de cette très belle collection « Carrément BD ». C’est un album inhabituellement grand, prévu pour un plus long récit, toilé… Je trouve l’objet superbe. Je pense avoir eu beaucoup de chance de voir mon histoire bénéficier de ce soin-là. Un carré présente un autre souffle. On peut l’utiliser comme l’habituel format rectangulaire et ne rien changer à sa narration. Certains le font… Moi, il me semblait idéal pour ce mouvement cyclonique de l’histoire. Un carré, dans quel sens le tenir, où est le haut ? La droite ? Quatre côtés identiques qui ne permettent plus de s’orienter… D’où mon découpage particulier.

Cette histoire s’apparente à un conte médiéval. Elle prend pour base certains des grands sujets du Moyen-âge, à savoir la représentation de la mort, des enfers, de la folie. Le traitement de ces sujets amenait-il une forme qui soit volontairement décalée, qui fasse (ré)agir, le lecteur, qui l’entraîne vers autre chose que ce qu’il peut connaître par ailleurs ?
Oui, c’est très curieux, tout le monde associe mon travail à un conte médiéval. Pourtant, Breugel, c’est la Renaissance. J’admet qu’il est lui-même très atypique. Il aborde pourtant les thèmes chers à cette période, l’humanisme par exemple, qu’il évoque par des sphères ou des globes. On en a une très belle dans la barque portée par un géant dans mon tableau de Margot. La danse macabre est elle-même apparue à la toute fin du Moyen-âge pour surtout se développer à la Renaissance. Le XVIè siècle, c’est quand même Erasme avec son « Eloge de la folie », Dürer avec ses « Cavaliers de l’Apocalypse », Rabelais avec « Gargantua »… Les gisants de cette époque montrent des corps abandonnés à la mort, en état de décomposition, les flancs creusés par la fonte des viscères. On est loin des gisants médiévaux symbolisant les vertus des belles dames et des chevaliers par de petits chiens sages reposant aux pieds de leur maître.
Pour Breugel, l’homme avec sa corporéité connaît trois lieux : la terre, le ciel, l’enfer. L’homme ne peut pas se trouver ailleurs que dans ces 3 endroits. Soit il les connaît parce qu’il en a  l’expérience, soit il s’y rend en imagination, en attendant que ses pérégrinations ne l’y emmènent réellement. Là où réside l’originalité du regard de Pieter, c’est que le ciel ou l’enfer ne nous tombe pas dessus comme une calamité, l’homme ne se retrouve pas enchaîné par des forces qui le dépassent, mais au contraire, il vit, agit et interagit avec les lieux où il se trouve. Le peintre s’interroge sur les problèmes que posent ces relations. Dans mon récit, Margot est elle-même dans cette situation-là. Oui, le monde réel est l’envers de la psyché de ce monde « imaginaire ». Donc tout aussi réel, mais « ailleurs ». Et malgré le chaos qu’elle y rencontre, chaos qui reste le reflet du tumulte de son univers ravagé par la peste et la guerre, elle continue à agir, elle brave décret divin, cavale apocalyptique, et mort inéluctable. J’ai d’ailleurs pris beaucoup de plaisir à imaginer un nouvel angle de vue de ces miroirs aux vanités (eux aussi très renaissants !) : alors que la tradition nous place toujours du côté de la jeune fille aux joues roses méditant sur son futur squelettique, j’aime à  placer le lecteur du côté de la carcasse  s’interrogeant sur l’épaisseur de la chair …

Le traitement de votre sujet n’est pas pour autant sombre dans le sens où vous ne décrivez pas un enfer « traditionnel ». Il y a même de l’humour au travers par exemple du passage sur la cité proverbiale. Pouvez-vous nous développer sur vos intentions au travers de cette histoire ?
J’ai une tendresse particulière pour l’univers de Vandersteen. Il ne jouit pas d’une reconnaissance du monde artistique, on ne lui prête pas de grandes lettres de noblesse, non, il reste l’auteur de BD de plage, dont les pages peuvent crisser de sable ou rester maculées de crème solaire sans que personne ne s’en formalise… Qui n’a jamais lu un Bob et Bobette « aan de kust » ? Pourtant, son talent est indéniable, le graphisme d’un « Teuf-Teuf club », son mystère prégnant, ses personnages aux jambes tordues, au front tavelé de rides…, et puis, gloire à un auteur capable de sacrer Héros de BD une petite fille à la chevelure improbable et au caractère entêté, à une époque où seuls les garçons pouvaient se targuer de vertus héroïques ! Tout ça pour vous expliquer que j’aimerais retrouver un peu de cet esprit « aventure tarazimboumante » dans mon travail. On dit du belge qu’il est débonnaire, ne se prend pas trop au sérieux, traite ses problèmes avec surréalisme… J’aimerais que mes personnages incarnent cela. J’aimerais mettre au point une narration qui débloque complètement sans pour autant perdre le fil du récit. Cela inclut l’humour. Comment rester grave lorsqu’on vit dans un pays dont l’emblème est un petit garçon tout nu qui pisse à la tête des passants ?

Quels sont vos projets à venir ?
Je suis effectivement sur plusieurs projets.
Je garde de vue mon attirance pour les personnages féminins particuliers. Construire une histoire qui « débloque » fonctionne mieux, à mon avis, si elle se greffe sur un personnage réel. Celui-ci sert de contre-pied à la fantaisie et du coup la rend plus inattendue et paradoxalement crédible… J’ai choisi de m’intéresser à Amelia Earhart, une femme exceptionnelle. Cette américaine est la première femme aviatrice à avoir survolé l’océan atlantique en solitaire (1928). Elle détient un nombre incroyable de records à une époque où les médecins étaient persuadés qu’une femme était anatomiquement incapable de voler, son utérus pouvant à tout moment être expulsé de son bas-ventre ! Elle a l’avantage d’être très graphique, tout en gardant un côté androgyne souligné par la mode de l’époque. Elle disparaît tragiquement à 40 ans en tentant un dernier record : boucler  son tour du monde par sa plus grande circonférence… Cette disparition a provoqué un engouement pour cette femme si déterminée. Disparaître aussi jeune, belle, dans un mystère aussi complet (elle n’a jamais été retrouvée) a donné naissance aux théories les plus abracadabrantes : certains vont jusqu’à affirmer qu’elle aurait été enlevée par des extraterrestres ! Mais si ce projet  est déjà bien débroussaillé par les nombreuses lectures et recherches de docs sur le sujet, sa charpente osseuse reste à construire.
Un autre projet, lui déjà bien avancé, est un projet jeunesse dont la pétillance éclate grâce aux couleurs de Samsa : « Fanny Catastrophe ». Une petite fille pirate, éduquée à broder des jolly rogers, à briquer des pièces de huit et à mitonner des tambouilles infâmes pour les otages, accumule les bêtises par ennui pendant que les mâles flibustiers, ces perdants magnifiques, hirsutes et  tranchants, se taillent la part belle de l’aventure… On rajoute à cela une cohabitation forcée avec des spectres marins… et Yohoho !

Pour en savoir plus :

http://www.lagalerie.be/murielblondeau/
http://www.pieter-bruegel.com/ 


Pour aller plus loin…

Entre Paradis et Enfer – Fonds Mercador/Musée Royaux d’Art et d’Histoire  – 2010
Coïncidence ? Alors que l’album Margot la folle de la dessinatrice belge Muriel Blondeau paraît chez Glénat, les Musées royaux d’Art et d’Histoire de Bruxelles proposent l’exposition Entre Paradis et enfer, mourir au Moyen-Age qui se tient jusqu’au 24 avril 2011. Le riche catalogue de l’exposition aborde les thématiques développées au fil des salles et permet de prolonger la visite elle-même. Concrètement l’ouvrage, rédigé sous la direction de Sophie Balace et Alexandre De Poorter, est divisé en quatre grandes sections qui embrassent la plupart des questions sur le sujet : Les causes de la mort au Moyen-Age, avec des développements sur l’hygiène, les grandes épidémies, la guerre, la médecine, Les rites funéraires, qui traite de la préparation à la mort et le passage dans l’au-delà, abordé notamment avec l’aide de l’archéologie, La topographie funéraire qui ouvre sur les monuments, sépultures et cimetières… et enfin De la mort à la résurrection, qui reprend notamment la vision de l’Enfer, l’Art de mourir, les dons à l’église ou un chapitre très intéressant sur le cimetière lieu de vie et de mort : Le cimetière est donc un lieu de vie, Il reste ouvert 24h/24. S’y rendait-on de jour comme de nuit ? La lumière ne cesse de briller dans l’enclos cimetérial, surtout quand se dresse une lanterne des morts. L’on peut s’y déplacer à la brune, espérer y rencontrer une femme aux mœurs faciles, cuver son vin, faire brûler une bûche de Noël. Les morts ne s’en offusquent pas, sauf si, ce faisant, on les dérange avec impiété : pas de pitié pour l’ivrogne qui trébuche sur un crâne délaissé sur le sol après une réduction de corps !

L’ouvrage, d’une riche iconographie édité sur papier glacé est d’une rare beauté. Il se veut soit le prolongement de la visite, soit une introduction à cette thématique de la mort qui passionne car souvent obscure aux yeux et à l’esprit du plus grand nombre. Nous ne pouvons que vous inviter à vous déplacer dans la capitale belge pour découvrir l’exposition. Vous repartirez sans aucun doute avec ce bel ouvrage qui se savoure de bout en bout !