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Prix Ouest France Quai des bulles 2018 : une sélection de haut niveau !



Le prix Ouest France Quai des Bulles est l’un des prix les plus appréciés dans le milieu de la bande dessinée, par la visibilité qu’il offre à une œuvre via la promotion qui lui est faite. Chaque année la sélction se base sur dix albums aux qualités évidentes qui sont soumises à un jury indépendant qui va d’abord effectuer un filtre sur cinq titres avant de communiquer, durant le festival l’heureux élu. Nous vous proposons de mettre en lumière la sélection initiale via notre présentation des 10 titres !

On peut voir dans Il faut flinguer Ramirez tout ce qu’Hollywood a pu pondre de bon dans ces polars à la sauce salsa. Avec un brin de piment façon Machete ou le meilleur d’un Tarantino. Des histoires déroulées en lisière de frontière mexicaine, là où la moiteur devient palpable dès 10 heures du matin et jusque très tard dans la nuit. Quelque part entre Phoenix et Tucson non loin d’El Paso pour mieux situer le lieu de l’action. Les mouches y sont légions, l’air frais beaucoup moins. Dans ce cadre propice à la sieste, un homme va pourtant être l’objet de toutes les attentions. Il manie le tournevis comme d’autres respirent, avec un naturel déconcertant. Ses interventions se déroulent devant un parterre de collègues misant quelques billets sur la réussite de la réparation. Un as du SAV, un chirurgien de la boîte qui l’emploie, Robotop, spécialisée dans l’électroménager et plus particulièrement dans les aspirateurs derniers cris. Avec des moustaches denses, une coiffe détonante, un air qui tire vers des termes pas très flatteur, il terrorise la pègre qui reconnait en lui l’homme qui les a défiés par le passé. Si Ramirez est un as dans son domaine, on le voit pourtant moins être un crack de la gâchette. Muet pas forcément charismatique, le mot est faible, il va se retrouver l’objet d’un règlement de compte sans merci. Et si derrière le réparateur d’aspirateurs se cachait un tueur expert, maintenant rangé, qui pourrait faire suer tout un cartel qui a mis sa tête à prix ?
Le public avait pu repérer son talent sur un Zombie nécrologie publié il y a quatre ans maintenant, Nicolas Petrimaux nous revient avec un projet ambitieux, survitaminé, lancé à grands renforts de promo de la part de son éditeur. Il fait dire que l’histoire détone. Un humour constant, des références au cinéma plus ou moins appuyées qui font mouches, un rythme d’enfer pour un récit au découpage magistral. Un album qui ne tombe pas dans le piège du sérieux même si le talent narratif de son auteur s’exprime au fil des planches séquencées en chapitres serrés. De la haute voltige pour un récit qui se savoure avec une Corona ou une Modelo à proximité de mains ! (à boire avec modération)
Nicolas Petrimaux – Il faut flinguer Ramirez – Glénat

 

Au départ le roman de Ron Rash paru en France en 2008. Un roman qui détone au travers de son héroïne, Serena, femme forte qui décide elle-même du chemin que doit prendre sa vie, sans que personne ne puisse l’en empêcher ou infléchir sur ses décisions. Elle débarque un matin d’un train en Caroline du Nord, dans ce territoire un brin austère des Smoky Mountains. Nous sommes en 1930, la crise économique bat son plein dans une société qui se prive de plus en plus de liberté dont celle, récente, de boire de l’alcool et les hommes et femmes du peuple, plongés dans une misère sans espoir, acceptent n’importe quelle tâche pour peu qu’elle rapporte de quoi acheter un bout de pain. Serena arrive donc dans ce qui ressemble à un trou profond, pas tout à fait de son standing, une de ses terres dont il semble difficile de tirer une quelconque richesse. Elle va pourtant très bien se fondre dans cet environnement en menant ses projets d’une main de fer, sans sentiment ni remords. L’homme qu’elle a épousé, riche propriétaire terrien, du même acabit va l’accompagner dans ses sombres desseins. Un duo qui manie la terreur et propre à asservir comme d’aucuns l’ont fait avant eux. Cette histoire Ron Rash la met en scène avec ce détachement qui glace le sang. Les personnages sont brut, campent leur rôle accentuant le désespoir d’une société sous perfusion pour encore quelques temps.
Anne-Caroline Pandolfo et Terkel Risbjerg s’emparent du roman avec maestria. Leur héroïne possède suffisamment de cruauté, de sauvagerie et de liberté pour nous saisir dès les premiers instants, comme dans la scène d’ouverture où elle critique ouvertement les hommes venus à sa rencontre dont la poignée n’a rien de virile et qui ne parviennent pas à soutenir son regard. La suite est du même acabit, les deux auteurs jouant sur de fabuleux jeux de regards, de Serena, de Pemberton, des hommes et femmes qu’ils rencontrent mais aussi des animaux qui peuplent les vastes forêts qui composent une grande partie du territoire où ils évoluent. Un album d’une totale maitrise qui porte haut l’exercice de la transposition du roman en bande dessinée et démontre tout son intérêt. Magistral !
Anne-Caroline Pandolfo et Terkel Risbjerg – Serena – Sarbacane

 

Zidrou et Edith, les deux noms inscrits sur la couverture laissent présager de belles choses à venir. Le scénariste prouve sur chaque projet sa capacité à tisser une histoire qui capte l’attention dès les premières planches autour de dialogues savamment ciselés. La dessinatrice quant à elle construit un univers tout à la fois mystérieux et poétique dans lequel elle love le lecteur en jouant sur une minutieuse manière de donner vie à ses personnages. La réunion des deux ne pouvait donc qu’aiguiser la curiosité. Avec Emma G. Wildford les deux auteurs choisissent de dessiner un pan de la vie d’une charmante héroïne anglaise qui brise les conventions strictes d’une société encore marquée par les conséquences de la boucherie de la première guerre mondiale. Auteure de poésies pour jeunes filles amoureuses, elle s’offre le luxe de soutenir les conversations « d’hommes » jusque dans les cercles où les femmes ne sont pas admises. Abandonnée par Roald son fiancé qui a décidé de parcourir les immensités enneigées de la Laponie finlandaise, où il a été aperçu la dernière fois à proximité du Lac Inari, elle va se mettre en tête, telle Alexandra David-Néel, de le retrouver, bravant la rigueur d’un nord encore que les hommes n’ont pas encore totalement dominé. Si l’idée de se rendre à la recherche de celui qu’elle aime (ou croit aimer) est louable, la jeune femme oublie au passage une lettre que son fiancé lui a transmise au cas où il lui arriverait malheur. Une lettre qui pourrait contenir des éléments essentiels propres à changer l’orientation de leur relation…
Le talent de conteur de Zidrou s’affine au fil des ans et des projets. Ici, dans un contexte où l’aventure domine, il dresse un portrait cinglant d’une Angleterre au sein de laquelle les femmes ne possèdent que les libertés que les hommes veulent bien leur donner. Emma détonne un peu dans cet univers machiste, où elle joue de ses « faiblesses » pour en faire de véritables forces. Héroïne attachante, elle possède tout à la fois une allure chic très british et une capacité à briser les codes d’une société encore totalement sclérosée. Il ne fallait rien de plus à Edith pour mettre des images sur des mots, donner corps à Emma, à une époque, avec cette capacité propre à offrir à chaque détail une force d’expression qui participe à densifier les moments les plus insignifiants. Cette histoire d’Emma ne peut se restreindre à un récit d’aventures, il est aussi celui d’une quête de soi, d’une volonté de ne pas subir le regard d’une société normée, et de prendre cette pleine possession de soi. Le récit est accompagné d’éléments du voyage d’Emma, un ticket d’embarquement, une photo, une enveloppe mystérieuse, offrant au lecteur la possibilité de se rapprocher au plus près de l’héroïne. Une porte ouverte vers l’aventure, sur les pas des voyageurs lointains…
Zidrou & Edith – Emma G. Wildford – Soleil

 

Une jeune femme et un jeune homme décident de devenir les éclaireurs d’un temps nouveau. Un temps au sein duquel le virtuel l’aura emporté sur le réel, le palpable, devenu, pour certains des hommes et femmes qui composent cette société du futur, bien trop terne et avec assurément trop de contraintes, d’imprévus, de maux et de contrariétés. Elle se prénomme Josiane et lui René, ils vont tous deux plonger dans une eau qui préserve leur corps physique puis être connectés à des récepteurs qui vont permettre le grand saut dans ce nouveau territoire de jeu. Ils  devront d’abord apprendre à composer avec le monde qui s’offre à eux. Apprendre à le construire, à le magnifier de leur moindre exigence ou fantasme. Car le but de cette vie (sans retour possible) dans le virtuel, c’est bel et bien de rendre possible l’impossible. Les préoccupations de Josiane se porteront en priorité sur le sexe, sur les expériences les plus débridées. René quant à lui aura plus de réserve au sein de ce monde. Les deux se retrouveront, partageront leurs expériences respectives avec en point de mire l’accueil prochain de toute une vague d’hommes et de femmes fortunés qui ont décidés de débrider leur vie. Mais ces arrivés de nouveaux individus, certains sans passion ni imagination demandera un accompagnement, une formation à l’univers qu’ils ont décidé d’épouser.
Thomas Cadène que nous connaissons pour son travail sur la série-feuilleton Les autres gens (Dupuis) propose dans Alt-Life une vision très singulière de notre futur. Une société si aseptisée qu’elle manque sérieusement de sel et de piment. Le monde virtuel proposé à tous ceux qui peuvent s’offrir le voyage vers des terrains de jeu infini, a, pour cette raison, de quoi séduire. Il porte cependant en lui les limites propres à chacun. Les limites de l’imagination, de cette capacité à donner sens à ses désirs, ses envies, sans que jamais ne s’installe la routine qui a précipité chacun dans ce monde virtuel. Ce qui devait devenir un nouvel Eden pourrait très bien ressembler à un faux-semblant, les relations entre les gens pouvant se perdre dans les modifications apportées par chacun à leur propre univers. Des questions naissent, si bien que le bonheur, pourrait finalement très bien ne pas se trouver dans cette société aux démesurés possibles. D’autant plus qu’un retour en arrière n’est pas prévu et que les corps stockés dans une sorte de liquide amiotique, pour les accompagner dans leur « renaissance », pourraient très bien devenir des charges à gérer pour ceux qui ont décidé (ou qui n’ont pas l’argent) pour plonger définitivement dans le monde virtuel. Saisissant, voire glacial. Un album choc qui pose des questions essentielles sur un des futurs possibles qui nous attend. Hautement recommandé.
Cadène & Falzon – Alt-Life – Le Lombard

 

Parfois nos yeux nous jouent des tours au point de nous faire percevoir une réalité qui est tout autre. Pas mal de personnes ont observé depuis toujours des choses bizarres dans un ciel à la nuit tombée. Des phénomènes si étranges qu’ils pourraient valoir à celui qui les rapporte des qualificatifs pas forcément flatteurs. En France le CNES par le biais du Groupe d’Études et d’Information sur les Phénomènes Aérospatiaux Non identifiés (GEIPA) dresse un inventaire de ces témoignages recueillis au fil des ans. Si la plupart des observations peuvent être expliquées, d’autres le sont moins. C’est peut-être ce qui se passe lorsque des lumières sont aperçues au-dessus du petit village de Vallièvre, perdu dans une campagne quelconque. Les médias relaient très vite l’information au point de créer une petite agitation dans le lycée voisin où certains ados sont friands de ce type de faits divers.
Claire et Wouki sont amis depuis l’enfance. Jules quant à lui est venu les rejoindre il y a tout juste un an. Persuadé de l’existence d’une intelligence extraterrestre le jeune garçon s’est passionné pour tout ce qui touche à l’astronomie, finissant d’emporter Claire, qui l’aime secrètement, dans sa vision du monde. En classe nos trois amis approchent leur vieux professeur de philosophie pour connaitre sa position sur la possible existence d’une intelligence non terrestre mais ne trouvent en réponse qu’un cartésianisme de façade attaché à la robe. Un évènement a priori anodin va pourtant changer la donne de ce bel agencement des choses. Absent jusqu’à nouvel ordre le professeur de philosophie se verra remplacé par une belle blonde aux formes affriolante, à l’hypersexualité affichée, qui, par ricochets, va faire entrer Claire définitivement dans l’âge adulte…
Le ciel peut nous dire beaucoup de notre passé et encore plus de notre futur. Claire, Wouki et Jules vivent depuis un an pour tout ce qui touche à l’astronomie, n’hésitant pas à se retrouver au soir couché pour observer le ciel avec une lunette. Dans leur désir de croire ils seront bousculés par le matérialisme de leur nouvelle professeure de philosophie pour qui toute référence religieuse ou magique empêche les hommes de passer dans l’âge adulte, bloqué par ce qu’elle nomme le Syndrome de Peter Pan ou refus de grandir. Jules sera absorbé de plus en plus par les formes de la jeune femme s’éloignant de ses amis et de Claire qui de son côté ne souhaite pas abdiquer si vite. Elle prendra pourtant un choix lourd de conséquences…
Arnaud Le Gouëfflec excelle dans ce type de récit qui s’immisce au plus près des personnages. Avec un indéniable talent il décortique leurs actes pour les confronter à des réalités qui les dépassent parfois. Il sait surtout prendre le temps, ralentir le rythme pour s’attacher à des détails qui peuvent se faire invisibles au plus grand nombre mais qui possèdent pourtant tout leur sens. La jeune Claire reste attachée à la magie d’une jeunesse rassurante qui l’autorise encore de rêver. Par un jeu de circonstances elle va pourtant mettre un coup d’accélérateur à son passage dans l’âge adulte. Récit qui navigue entre nostalgie de l’enfance, fantastique et polar sombre, La carte du ciel possède une remarquable force d’attraction, dopé par le dessin expressif de Laurent Richard. Un dessin qui respire par le choix de ne pas charger en textes certains passages qui vivent par l’image. Une réussite sur toute la ligne !
Le Gouëfflec / Richard – La carte du ciel – Glénat

 

Sur l’ensemble de sa carrière  Jean-Marc  Rochette  a  peu  scénarisé  et pas  depuis  un  certain temps. Ailefroide ne pouvait toutefois  pas  se  construire autrement  que  par  sa propre  vision,  son  propre sentiment  et  ressenti  d’un passé déjà distant. Dans un récit  en  forme  de  mémoire sur  une  partie  de  sa  jeunesse,  au  cours  de  laquelle il  grimpait  en  haute  montagne avec une passion dévorante, souvent dans des situations où le risque s’affichait palpable, Jean-Marc Rochette nous happe dès les premiers instants. Pourtant  le risque, sur  ce  type d’histoire,  restait d’intéresser uniquement les initiés. Avaler des « murs » de plusieurs centaines de mètres ne passionne ou ne fait pas forcément  vibrer  ceux  que  la  fibre  montagnarde  n’atteint pas.
Pour se sortir du piège Jean-Marc Rochette prend le parti de ne pas nous parler de montagne, ou tout du moins pas que, mais de livrer en revanche un récit où elle s’impose comme un personnage à part entière. Un personnage à  domestiquer.  Parfois  dure,  impalpable,  muette,  rugueuse,  bavarde  ou  mutique,  elle  peut  se  faire  froide ou enveloppante, tout comme elle peut mettre à mal les certitudes ou l’arrogance de ceux qui la sous-estime, ne serait-ce  qu’un  instant.  L’auteur  nous  parle  aussi  des  rapports, pas forcément faciles, d’un garçon à sa mère, et de cette soif  de  goûter  à  une  forme  de  liberté  et  d’affranchissement. Narrativement  Jean-Marc Rochette, aidé par Olivier Bocquet dans la construction de la trame,  livre  un  récit d’une grande force d’expression soutenu par un dessin qui magnifie  sans  cesse  les  scènes  y  compris  les  plus  dures. Un album qui donne une sacrée claque à ceux qui s’y laissent prendre…
Jean-Marc Rochette – Ailefroide – Casterman

 

Sur une route de campagne dans une zone vallonnée des États-Unis, un homme fait du stop. Une pluie dense s’abat sur lui lorsqu’une voiture passe à sa hauteur et s’arrête. À l’intérieur un autre homme, borsalino vissé sur la tête, lui précise qu’il se rend à Shenectady dans l’état de New-York à quelques encablures de sa capitale Albany. L’autostoppeur lui indique sobrement que la destination lui convient et monte dans le véhicule. L’homme au chapeau engage alors la conversation qui se porte très vite sur un sujet sensible, celui de la religion. Notre autostoppeur avoue ne plus croire en dieu depuis des temps immémoriaux ce qui peut paraître surprenant vu son jeune âge. Mais peu importe puisque notre homme au chapeau, en représentant de la sainte parole, se propose de l’aider à rentrer dans le droit chemin. Et quoi de mieux que d’acheter une des bibles luxueuses qu’il vend au cours de ses déplacements ? Notre autostoppeur n’a pas d’argent sur lui et le sac lourd qu’il transporte ne contient, il le dit lui-même, « rien qui ait de la valeur pour vous, ou pour quiconque ». L’incroyance et ce qu’il interprète comme de l’arrogance chez son passager fait sortir de ses gonds l’homme au chapeau qui pense de plus en plus être en présence du diable en personne…
Koren Shadmi cultive un intérêt manifeste pour l’étrange. Dans Abaddon (Ici Même) il dressait un huis clos des plus anxiogènes autour d’un homme coincé dans un appartement qu’il venait visiter dans le but de louer une chambre. Dans Le voyageur son héros sillonne les Etats-Unis, sans but apparent ni destination précise, sans enthousiasme ni passion. Sans délivrer trop de son passé il évoque un futur que les personnes qu’il croise n’envisagent et ne souhaitent pas. Ceux qui partagent de rares moments avec lui arrivent difficilement à entrevoir ce qui le motive. Impénétrable, au discours resserré, l’homme s’exprime avec pas mal de sous-entendus et un ton décalé qui font douter de sa santé mentale et jettent dans l’instant des nuées d’interrogations. Le Voyageur possède en lui un terrible secret, celui de l’immortalité, un secret inaudible pour le commun des mortels, hommes et femmes qui déifient l’immédiateté en entretenant ce qui reste d’humanité dans une stérile torpeur. La société qui en découle s’est depuis longtemps résignée. Elle place à son sommet et pour de brefs instants encore les plus forts et les plus riches qui bientôt emporteront avec eux les secrets des dernières horreurs qu’ils ont commises.
Le Voyageur, lui, traverse les époques. Et les paysages qu’il parcourt changent irrémédiablement pour se faire toujours plus arides, désertiques et dépeuplés, sans vie et sans âme. Koren Shadmi construit son récit en chapitres qui sont autant de rencontres faites avec des hommes et des femmes de passage. Ensemble ils mettent en évidence les travers d’une société qui a cessé depuis longtemps de s’illusionner au point de vouer un culte à sa plus sombre expression. Si chaque histoire possède une base chromatique propre qui densifie la portée du message, le trait se fait quant à lui expressif et riche, en soutenant un texte qui, sans se faire spécialement bavard, donne aux mots une valeur symbolique qui stimule en permanence l’imaginaire du lecteur. Koren Shadmi, au travers de son voyageur, s’impose comme l’un des auteurs majeurs de graphic novels, servi par une édition française des plus exigeantes.  
Koren Shadmi – Le Voyageur – Ici même

 

Et aussi…

Un album hilarant sur le temps qui passe, le rapport au corps à l’approche de la cinquantaine. Quand on est un homme en pleine force de l’âge et qu’on veut (encore) plaire aux jeunes gars, il faut suivre quelques préconisations simple : manger léger, pratiquer la muscu en salle de gym à peu près 12 fois par semaine, appliquer des lotions capillaires, des crèmes de jour et de nuit en respectant bien les horaires…Et surtout, ne pas perdre espoir ! (présentation éditeur)
Pochep – Vieille peau – Fluide Glacial

 

Le Cloud a implosé, et avec lui tous les secrets les plus précieux de l’humanité, des trafics les plus illicites aux photos de voyage du citoyen lambda, se sont retrouvés à la portée de tous. Désormais, nous évoluons masqués, seul moyen de protéger ce qu’il reste de notre intimité. Bienvenue dans une société post-Internet. Brian K. Vaughan est l’auteur lauréat de l’Eisner Award du Meilleur Scénariste pour Y : Le Dernier Homme et Ex Machina. (présentation éditeur)
Brian K. Vaughan & Martin Marcos – The Private Eye – Urban Comics

 

En 1934, Xavier de Hauteclocque, grand reporter, publie La Tragédie brune, écrit à la suite de son voyage en Allemagne en novembre 1933. Ce germanophile y décrit un pays remodelé par la politique nazie. Son regard s’attarde là où d’autres ferment les yeux, ses pas le conduisent là où peu s’aventurent et, finalement, sa plume décrit ce que beaucoup préfèrent ignorer. Son récit, à la première personne, frappe par sa modernité, sa sincérité, sa lucidité et surtout, avec le recul tragique de l’histoire, par son caractère prémonitoire. La Tragédie brune nous plonge dans ces années d’avant-guerre, à l’heure où Hitler affirme sa toute-puissance politique. Christophe Gaultier et Thomas Cadène s’attachent à mettre en scène le plus fidèlement possible le témoignage d’un homme qui, dès 1934, va alerter le monde sur la catastrophe à venir. (présentation éditeur)
Thomas Cadène & Christophe Gaultier – La tragédie brune – Les Arènes