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Tind, Typographie, Littérature & BD !



Créer une revue en 2014… Faut-il vivre ailleurs, sur une autre planète, oublier que la crise est là, pérenne, prête à accentuer les grands écarts déjà visibles entre les différentes strates de notre société ? Ou bien ambitieux sans se prendre au sérieux, avide de partager des passions revigorantes et rafraichissantes dans des temps de moiteur ? Cela nous ferait presque penser au Paris au XXème siècle de Jules Verne, un Paris qui a oublié les lettres, la grande littérature pour s’inscrire dans le fonctionnel, la désincarnation, la déshumanisation, toutes ses choses qui, au final, n’ont d’autres but que de détruire progressivement la fameuse machine à rêves. Les derniers foyers de résistances existent et Tind en fait partie !

Il y a peu de temps encore on nous annonçait la mort progressive de la presse papier de qualité frappée par la montée progressive d’internet et de son contenu protéiforme et plus récemment de l’apparition de la presse papier gratuite qui propose des articles express prêt à jeter. Malgré ce phénomène qui apparaissait comme irréversible pour nombre de spécialistes du livre, la fin des années 2000 et le début des années 2010 ont vu fleurir sur les étagères de nos bonnes librairies tout un tas de revues et de magazines de qualité aux thématiques variées voire improbables : Le Tigre, XXI, Muze, Back Cover, The Drawer, Usbek&Rica, La Revue Dessinée, AAARG !… à vrai dire j’en oublie au passage toute une pelletée dans des sphères où mon regard ne se perd pas encore.

Ainsi, défiant les lois de la probabilité, l’éclosion de ces nouveaux titres s’inscrit comme un phénomène éditorial sans précédent. Au milieu de toute cette agitation, de ce flux dynamique et jouissif apparait un titre tout aussi ambitieux que ses petits confrères, Tind (pour Typographie Is Not Dead). Le quatrième de couv’ explique en trois phrases ce qui faut s’attendre à trouver dans les pages intérieures : Tind ? C’est une nouvelle revue culturelle. Une revue qui a décidé d’allier humour, harmonie et intelligence pour parler de culture et de littérature. Une revue qui s’attache au passé, au présent et à l’avenir. Une revue de lettre(s) et d’image, qui peut parler sérieusement, sans se prendre au sérieux.

TindConcrètement Tind aborde trois axes majeurs qui sont la typographie, la BD et la littérature, mais n’exclue pas pour autant d’aller voir ailleurs. Le sommaire du premier numéro s’affiche plein de promesses : un article de fond sur la police Comic Sans (incroyable !), le mouvement atome dans la BD, des interviews, des articles décalés comme celui sur Calvin & Hobbes, un feuilleton littéraire comme dans les revues de la fin du XIXème et du début du XXème siècles, et plein d’autres choses encore. C’est dense, sans tabou, avec une grande liberté de ton. Mais ce qui reste pour moi le plus intéressant demeure sûrement le fait que, si le fond est là, riche et diversifié, captivant et sans ambages, stimulant comme il se doit pour une revue ambitieuse, Tind ne sacrifie pas pour autant la forme. La mise en page dynamique notamment dans les ouvertures d’articles, regorge de trouvailles et de détails pour nos mirettes ébahies.

La bichromie noir/bleu de ce premier numéro ajoute même un côté chic, sérieux sans l’être trop à cette revue de qualité. Bref de la bonne matière, une matière que l’on a envie de prendre en main, de lire dans le métro en l’affichant ouvertement aux passagers assis près de nous, pour leur dire peut-être, ambitieux que nous sommes, qu’ils peuvent poser sur leur siège le dernier roman de Musso qu’ils dévorent avidement pour venir voir du côté de chez Tind, même si le moelleux de la madeleine est plus marqué chez l’auteur aux milles et un succès littéraires ils pourraient y trouver des pépites acidulées propres à les faire voyager vers d’autres ailleurs.

Tind est disponible dans toutes les bonnes librairies et aussi par abonnement ici.