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Jazz à Luz, retour sur un festival atypique !



L’été, période favorable aux musiques en « extérieur » dont le jazz, regorge de festivals. Difficile de choisir entre celui-ci ou celui-là. Nous avons décidé de vous en présenter un, Jazz à Luz, sûrement plus aventureux que d’autres il profite d’un superbe cadre pour mêler musique, tourisme vert et découverte d’un patrimoine…

 jazzaluz

Le festival de jazz de Luz-Saint-Sauveur fait figure d’ovni sur la scène musicale française. Niché en plein cœur des Pyrénées, il accueille des musiciens français et internationaux parmi les meilleurs de leur génération. Pour donner quelques exemples de créateurs que j’ai pu y voir lors de mes venues régulières je citerais Joachim Kühn, Jean-François Jenny-Clark, Bernard Lubat, Sylvain Kassap, Iva Bittova, Didier Petit, Marc Ducret, Noël Akchoté, Claude Tchamitchian, Benoît Delbecq, Ellery Eskelin, Carlos Zingaro, Michel Doneda, Ramon Lopez, Joëlle Léandre… Excusez du peu… Jazz à Luz fait chaque année le choix de l’audace en proposant un répertoire aventureux qui donne à l’improvisation toutes ses lettres de noblesse. Il n’est pas rare lors d’une représentation, que ce soit dans le cadre intime de la Maison de la Vallée ou sous le chapiteau principal, de se dire que l’on assiste à un moment unique magnifié tout à la fois par la réactivité du public, l’envie du musicien d’exprimer son art, de se mettre à nue, et ce cadre improbable.

Cette année était peut-être différente des autres. La faute à quelques inondations qui ont marquées la ville et son paysage alentour. Le parcours en voiture depuis la sortie de Lourdes et surtout en arrivant à proximité d’Argelest-Gazost ressemblait ainsi à un véritable chemin de croix. Les routes fragilisées sur la montée vers Luz laissaient entrevoir ce qu’avait pu être le rugissement du Gave et des torrents de montagnes. Dans ces conditions Jazz à Luz aurait très bien pu ne pas avoir lieu. C’était sans compter sur la force de conviction des bénévoles, des pouvoirs publics – le maire Alain Lescoules, devait reconnaitre plus tard qu’il n’avait jamais envisagé que le festival puisse ne pas se dérouler – et de l’association Jazz Pyr’ à faire vivre la musique comme c’est le cas depuis 23 ans…

Côté programmation Jazz à Luz ne déroge pas à la règle et fait confiance aux interventions improbables et savoureuses. Nous vous offrons dans la vidéo qui suit quelques extraits pour saisir un moment de ce festival qui défend et revendique l’éclectisme comme moteur dans son approche. Nous y découvrirons notamment le duo David Chiesa (contrebasse) & Mathieu Werchowski (violon et alto) qui représente assez bien l’image du festival entre énergie et susurrement des notes qui se font parfois plus volatiles et éphémères. Nous plongerons ensuite dans l’énergie ravageuse d’une formation inédite comprenant John Dikeman (saxophone), Onno Govaert (batterie), Jasper Stadhouders (guitare, basse) et Jean-Yves Evrard (guitare). Un son lourd à réveiller les morts type Borbetomagus qui occupe l’espace et au-delà avec urgence. L’énergie Sophie Agnel (piano), John Edwards (contrebasse) et Steve Noble (batterie) en ont à revendre. Sophie s’aventure dans l’antre de son instrument pour faire crier les cordes, les pousser à sortir des déconstructions qui structurent son improvisation et repousse sans cesse des limites connues. C’est frais, atmosphérique et souvent planant… Stine Janvin Motland s’inscrit dans cette veine de chanteuse qui travaille la voix comme un instrument. Elle arrive ainsi à une maitrise totale des effets. C’est surprenant et envoûtant à la fois par la palette élargie que cette chanteuse du grand nord arrive à déployer. Emilie Lesbros quant à elle propose une autre façon de mêler la voix à la musique dans une recherche permanente d’ouverture placée sous le bonne humeur et le partage. Entourée du vétéran Sylvain Kassap et de Sylvain Darrifourcq, sa prestation laisse planer des effluves de très bon jazz… Pour finir cette vingt-troisième édition Jazz à Luz donnait à entendre et à voir le solo du pianiste américain Craig Taborn. L’instrumentiste n’est pas un petit nouveau, il avait fait ses classes avec le bouillonnant James Carter. Depuis quelques temps il se consacre au solo qui lui permet de travailler le son à l’instrument, de repousser aussi ses propres limites dans un mélange de free jazz qui tiendrait parfois du Third Stream. Une belle fin de voyage !

A l’année prochaine pour se rapprocher encore plus du quart de siècle de ce festival atypique et réjouissant !

 

La vidéo 2013 !