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La jeunesse de Yoshio de Yoshiharu Tsuge (Cornelius)



Le jeudi 17 septembre sortira l’ouvrage La jeunesse de Yoshio de Yoshiharu Tsuge. Quatrième tome de l’anthologie que les éditions Cornelius consacrent à cet auteur majeur de la bande dessinée, ce recueil présente 7 histoires parues entre 1973 et 1974. Comme pour les autres volumes, le livre est complété d’une postface du traducteur de l’ouvrage, Léopold Dahan, qui permet de remettre en contexte chacune de ces histoires.

Les récits qui composent ce quatrième volume marquent l’apparition de thèmes inédits, caractéristiques de la nouvelle orientation de l’auteur, et qui reviendront comme des motifs récurrents. Le quotidien en couple, la vacuité des voyages, le désir de changement de carrière ou encore les souvenirs de jeunesse deviennent des sources d’inspiration pour Tsuge, qui extériorise grâce au dessin une forme de mal-être social.

A noter que nous vous avons déjà présenté Les Fleurs pourpres et Le marais, ainsi que L’homme sans talent sorti lui chez Atrabile.

En 1972, Yoshiharu Tsuge est déjà entré dans la légende du manga. Il est le premier auteur à être reconnu au-delà du cercle des amateurs de bande dessinée. La vis, son histoire parue en 1968 dans le numéro spécial que la mythique revue Garo lui a consacré, est désormais un classique reconnu par les milieux intellectuels. Quant à la forme de bande dessinée qu’il a mise au point, le watakushi manga – « la bande dessinée du moi », qui entremêle autobiographie et fiction pour créer une forme d’authenticité inédite – elle fait désormais école et inspire toute une génération.

Mais Yoshiharu Tsuge refuse de se vivre en professionnel du métier. Il place son exigence d’auteur et son indépendance avant sa carrière. Les multiples déceptions qu’il a connues, son tempérament mélancolique et la précarité financière du milieu l’ont amené à se retirer de la profession à plusieurs reprises. Son départ de Garo n’a fait que renforcer son statut d’artiste hors-norme, tout comme ses périodes de silence. En 1972, il quitte Shigeru Mizuki, dont il était l’un des assistants depuis six ans, perdant son seul revenu régulier. Il cherche à nouveau des commandes. Mais il n’est pas question pour lui de se plier aux attentes des éditeurs et du marché. Il veut poursuivre sa quête de la juste écriture.

À 36 ans, Tsuge entreprend une série d’histoires qui l’attirent inexorablement vers un dévoilement toujours plus grand de son intimité. Abordant frontalement la question autobiographique, il se tourne vers son passé et puise dans son enfance et son accession à l’âge adulte des récits dans lesquels son style ne cesse de surprendre et de se réinventer, insouciant de l’opinion des lecteurs.

A propos de l’auteur

Né en 1937 à Tokyo, Yoshiharu Tsuge connaît une enfance difficile marquée par la pauvreté. Quittant l’école à quatorze ans, il enchaîne les petits boulots et cherche à échapper à son milieu familial, fuyant la violence d’un beau-père qu’il exècre. À dix-huit ans, il entame une carrière de mangaka en réalisant des histoires pour les librairies de prêt qui fleurissent dans le Japon d’après-guerre – un système aujourd’hui disparu à mi-chemin entre bibliothèque et librairie. À cette époque, on reconnaît dans son style l’influence d’Osamu Tezuka, ainsi que celle du gekiga, un mouvement tout juste créé sous l’impulsion de Yoshihiro Tatsumi, qui souhaite faire évoluer le manga vers des sujets plus réalistes.

L’originalité de son écriture le fait rapidement remarquer et il est contacté en 1965 par Katsuichi Nagai, le fondateur du légendaire magazine Garo. Il commence à publier dans la revue à partir de 1966. Les premières réactions des lecteurs sont négatives. Sujet à la dépression, Tsuge publie peu et devient l’assistant de Shigeru Mizuki. Cette collaboration lui redonne de l’assurance. En 1968 sa nouvelle Neji Shiki, « La vis », dans laquelle il relate un de ses rêves, marque profondément les esprits et devient un classique instantané.

Son style évolue vite et se construit autour d’une inspiration hybride, qui mêle registre intime et forme onirique. Il donne ainsi naissance à un nouveau genre proche de l’auto-fiction, le watakushi manga, « la bande dessinée du moi ».  Sa production se ralentit au cours des années 1980 et il cesse de publier après L’Homme sans talent (Atrabile). L’intérêt pour l’œuvre de ce génie ne s’est cependant jamais affaibli et il reste l’une des figures majeures de son art.

Informations pratiques

La jeunesse de Yoshio
de Yoshiharu Tsuge

Editions Cornelius, Collection Pierre
244 pages en noir, 17 x 24 cm
Couverture cartonnée avec jaquette
Prix : 25,50€
ISBN 978 2 36081 183 0
Sortie : 17/09/20