Il fait partie de ses auteurs qui ont renouvelé le médium en profondeur, introduisant une liberté dans la création, une poésie aussi qui a marqué et marque encore les dessinateurs depuis quelques décennies. Aujourd’hui la famille de l’auteur entreprend de publier des inédits ou des versions « augmentées » de ses travaux. Lézards rêveurs en fait partie, et expose comment s’agençait la fabuleuse machine à rêves d’un auteur qu’il faut toujours relire…

Un chien andalou a été réalisé à partir de rêves faits par Luis Buñuel et Salvador Dalí. Le résultat détonant a ouvert son réalisateur au groupe surréaliste. Moebius partageait le même intérêt que ses prédécesseurs pour les rêves. Il lui arrivait ainsi, souvent, de consigner dans des petits carnets des dessins faits à la volée, inspirés de ses songes ou de ses méditations, d’idées qui le traversaient et qu’il souhaitait glisser sur le papier pour, pourquoi pas plus tard, les mettre en avant dans un de ses récits. Des portraits, des esquisses, des histoires de plusieurs pages ou de simples illustrations faites de quelques traits… Un patchwork de pierres posées pour nourrir sa création future.

Lézards rêveurs réunit deux carnets sur lesquels l’auteur d’Arzach a couché les idées de futurs récits ou de futurs projets, avortés ou pas. En les reproduisant intégralement ici, Moebius Productions, qui a entrepris d’éditer des documents parfois inédits du dessinateur avec une importance toute particulière attachée à l’objet-livre (nous ne saurons trop vous conseiller de lire le récent Arzak, destination Tassili), poursuit ici son travail méticuleux et toujours soigné. Le format, qui colle à celui des carnets, la couverture superbe, tant graphiquement que dans son cartonnage, immerge véritablement le lecteur au plus près de la création d’un des auteurs les plus essentiels du neuvième art. Un livre précieux pour collectionneurs ou amateurs de beaux dessins qui donne à voir la fabrique des idées. Des idées puisées dans un univers de rêves et d’étrange, de beauté et d’horreur, de perception et d’imperception, en tous cas propres à colorer des univers parfois gris ou sans relief. Indispensable !

Jean Giraud Moebius – Lézards rêveurs – Moebius Production