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L’HeBDo, l’actualité de la BD – Les sorties de la semaine du 26 mars au 1er avril 2016

Après un premier rendez-vous très dense et la présentation d’une quinzaine de titres, l’HeBDo de cette semaine est un peu moins chargé, mais vous invite à découvrir de beaux projets avec notamment l’attraction de ce début d’année, à savoir la sortie tant attendue du superbe L’homme qui tua Lucky Luke de Matthieu Bonhomme (Dargaud). Nous retrouvons aussi la fin du diptyque familial d’Antonio Altarriba qui livre dans L’aile brisée (Denoël Graphic) un portrait touchant de sa mère après avoir mis son père en lumière dans L’art de voler. Avec Frapper le sol (Actes sud) Céline Wagner poursuit un travail subtil, toujours au plus près de ses personnages, ici Tatsumi Hijikata inventeur du butô. D’autres projets sélectionnés parmi les titres marquants de cette semaine vous sont présentés, laissez-vous porter !

Une HeBDo

Le carrefourElias Baumer est expert en assurance et s’occupe notamment des accidents de la route. L’homme est si méticuleux qu’il aime creuser ses dossiers au point de reconstituer les scènes dans lesquelles les accidents surviennent, autant pour tenter de percevoir ce qui a pu arriver lors du drame que pour prévenir les futures tragédies qui pourraient survenir au même endroit. Car il arrive parfois que des accidents de la route surviennent sur un même lieu, à cause d’une mauvaise visibilité, de la présence d’arbres ou de nappes de brouillards, d’éléments perturbateurs qui viennent gêner ou détourner l’attention le temps d’un instant qui peut se révéler tragique. Lorsque le récit débute Elias Baumer se rend à Yvette-sur-Loing un petit village a priori sans problème qui, pourtant, se voit frappé régulièrement de plusieurs drames humains dus à des accidents à répétition survenus au carrefour de l’Etoile rouge. Elias Baumer décide de s’y rendre autant pour lever les voiles sur le présent que pour dénouer un passé sombre et trouble dont il n’arrive pas à se défaire… L’homme reste coupé de sa fille qu’il n’entrevoit plus qu’une fois par an pour fleurir la tombe de sa mère et la tension procurée par ces brefs instants partagés reste palpable même si chacun semble retenir en lui les mots qui pourraient délier les maux enfouis. C’est à la faveur d’un coup de mou de sa boîte qui déterre de vieux dossiers, qu’Elias Baumer se rend sur ces lieux qui lui sont familiers. Des lieux où il a connu lui-même un terrible accident qui causa la mort de deux femmes qui voisinaient proche du carrefour de l’Etoile. Ce drame obsessionnel, il ne s’en souvient finalement que peu car lui et l’homme qui l’accompagnait étaient totalement ivres lors des faits. Il sait par contre les conséquences qui ont directement découlées du drame, la rupture avec les proches, les reproches et la difficulté à se reconstruire, le terrible éloignement de sa fille qu’il n’aperçoit plus alors qu’il a tant à lui offrir.
L’histoire a priori très simple construite par Arnaud Floch dans cet album se couvre au fil des pages d’une réelle densité émotionnelle. D’abord en raison du drame vécu par l’homme qui nous apparaît plus lisible au fil des pages et des flashbacks qui viennent nous éclairer sur un passé pas si lointain, mais aussi car le scénariste se plait à creuser ses personnages secondaires qui donnent du fond au récit. Le petit Paul premier contact de notre expert en assurance et son lapin, les deux garagistes pour qui le carrefour meurtrier reste une aubaine, la taulier de son hôtel qui dessine à ses heures des véhicules militaires, ce garçon troublé qui a perdu une main et qui la cherche en vain dans les champs environnant depuis trois ans, cette femme sombre qui déambule pour collecter les cadavres de chats écrasés et bien d’autres encore. Floch construit son récit par volutes, se laissant le soin de révéler les aspects les plus troubles avec une certaine délicatesse. Il laisse aussi le soin à Grégory Charlet de poser l’ambiance graphique qui fonctionne merveilleusement pour dépeindre cette année 68, trouble à bien des égards. Loin de l’agitation de la ville, Yvette-sur-Loing devient un sanctuaire habité des malheurs et des souvenirs de ses habitants qui tous, préfèrent conserver le carrefour meurtrier plutôt que de couper les liens avec leurs proches disparus. Un album touchant à plus d’un titre…

Floch & Charlet – Le Carrefour – Grand Angle – 2016 – 18,90 euros

Un maillot pour l'AlgérieLa seconde guerre mondiale vient tout juste de s’achever et la France reprend les affaires courantes dans ses colonies et notamment en Algérie. En métropole les tensions deviennent palpables dès le début des années 50 lorsque la guerre d’Algérie vient troubler un ordre qui pensait être établi. A l’aube de la Coupe du monde de football de 1958 où la France entend jouer un grand rôle portée par des athlètes au talent rare, Just Fontaine, Raymond Kopa et Roger Piantoni en tête, des joueurs issus d’Algérie et jouant dans les plus grands clubs français vont se faire la male pour fonder la première équipe nationale. L’histoire retiendra le défi des hommes, leur humilité et leur effacement pour leur cause alors qu’ils se voyaient promis à de belles et riches carrières. Ils porteront l’idée symbolique d’une nation unie et indépendante, en effectuant une tournée de plusieurs dizaines de matches dans des endroits parfois reculés d’Asie ou d’Europe centrale. Dans ce contexte de tension permanente l’esprit et la soif de liberté l’emportent sans conteste sur les destins individuels. Kris et Galic s’attaquent avec Un maillot pour l’Algérie à un pan de l’histoire sportive peu connue aujourd’hui, ils livrent sur la base d’une riche documentation détaillée en annexe de cet album, le parcours de footballeurs qui ont sacrifié leur aisance financière à l’amour de leur nation et l’envie de la voir s’affranchir enfin de la mainmise de la France. Le dessin de Rey, retrace à merveille l’ambiance des années 50 et 60. Mais il excelle surtout dans la reconstitution des scènes de matches dans lesquelles il donne à voir toute la tension et le rythme des compétitions. Un album qui non seulement nous éclaire sur un point de l’histoire oublié, mais aussi nous offre une belle galerie de portraits, Mekhloufi, Rouaï, Zitouni en tête.

Rey, Galic & Kris – Un maillot pour l’Algérie – Dupuis – 2016 – 24 euros

Aile briséeIl y a cinq ans Antonio Altarriba livrait dans L’art de voler un regard sur sa famille au travers du parcours de son père, opposant à Franco, balancé par les soubresauts d’une histoire espagnole tragique. Rien ne laissait présager d’une suite à ce premier projet et ce n’est que dans les annexes de ce second volume que le scénariste s’explique sur sa démarche de livrer une suite axée cette fois-ci sur le parcours singulier et méritoire de sa mère. Un second volet qui prend corps dans l’esprit du scénariste lors d’une rencontre avec une lectrice qui l’interrogeait sur le rôle de sa mère et la place qu’elle occupait dans la cellule familiale. Pour Antonio Altarriba L’Art de voler minimisait peut-être trop la place de sa mère au sein d’une famille qui devait lutter chaque jour davantage pour survivre. Ce second tome met donc en scène Petra qui connut et vécut le chaud et le froid aux côtés de quatre hommes qui auront marqués de façon indélébile sa vie. Chacun d’eux se voit offrir par Altarriba un chapitre à commencer par ce père tyrannique qui n’aura jamais admis que sa fille vienne au monde en tuant la femme de sa vie et qui, de rage et de désespoir, tentera de la tuer en retour. Petra n’échappera à une fin funeste que par l’intervention salvatrice de sa sœur Florentina. De cette entrée malheureuse dans la vie la jeune enfant perdra l’usage de son bras gauche. D’ailleurs, et aussi troublant que cela puisse paraître, ce bras mort que Petra cache à ses proches sa vie durant, Antonio Altarriba ne le découvre que bien des années plus tard lorsqu’elle s’éteint doucement sur son lit de mort. En dépit de cette souffrance physique lâchement infligée Petra ne vouera pas de haine envers ce père violent et blessant, peut-être en raison de la complexité du personnage, homme aux multiples talents, coiffeur, barbier, infirmier, gérant d’une épicerie et auteur de pièces de théâtre jouées lors des fêtes villageoises. Petra s’affranchira du père pour rejoindre, la ville en tant que gouvernante du gouverneur militaire de la province de Saragosse. Là, malgré le contexte particulier – son patron opposant à Franco, travaille à rétablir la monarchie en Espagne – elle tentera de s’épanouir dans des fonctions qui la mette très justement en valeur tout en cachant encore et toujours son handicap. Peu avant la mutation de son patron à Barcelone Petra fait la rencontre d’Antonio, l’homme qui sera son époux durant 35 ans. Peu après leur mariage né Antonio junior. Un accouchement difficile qui ne lui permet pas d’enfanter une nouvelle fois sans mettre en danger sa vie. L’abstinence s’installe donc dans le couple dont la flamme vacille et s’éteint progressivement… Au travers du destin de sa mère, Antonio Altarriba livre un portrait sensible des femmes sous la dictature de Franco. Des femmes qui se doivent de porter une dévotion et un asservissement total à leur époux sans qu’elles ne puissent exprimer leurs véritables envies sur la vie sans relief qu’elles sont contraintes de traverser des années durant. Petra retrouvera un peu goût à la vie dans les derniers moments de sa vie, sous les assauts répétés d’un prétendant qui recolore des instants devenus précieux. Altarriba donne à voir ce qui se cache dans les foyers miséreux d’une Espagne en proie à des difficultés économiques notables et des privations difficiles à concevoir pour des pans entiers d’une population toujours plus fragilisée. L’Espagne, personnage à part entière du diptyque d’Antonio Alatarriba, voit cohabiter en son sein des franquistes purs et durs, des anciens opposants au Généralissime et des monarchistes frustrés. Rien ne pourra vraiment apaiser les tensions qui naissent et se développent entre les hommes. Dans ce contexte, un personnage comme Petra, au destin infantile tragique, qui œuvra sa vie durant dans l’ombre méritait sûrement cette lumière offerte par un fils…

Altarriba & Kim – L’aile brisée – Denoël graphic – 2016 – 23,50 euros

J'ai tué - MaratLe peintre Jean-Jacques Hauer est introduit dans la cellule de celle qui vient tout juste d’assassiner l’ami du peuple. Dans cette France qui coupe les têtes à la chaine dans un cadencement presque ininterrompu, le peuple ne se plie pas vraiment en compassion pour Charlotte Corday. Ce laps de temps qui la sépare de son destin, la jeune femme accepte de le passer en compagnie de l’artiste. La préparation suit son cours, cheveux coupés, habit de « cérémonie » tout d’un rouge réservé aux auteurs de parricides revêtu, puis cette montée dans la charrette qui la porte à travers une foule venue déverser sa haine et voir la tête or de la jeune normande portée à bout de bras par un bourreau aux yeux sombres très bien rôdé à l’exercice. L’histoire se souviendra du crime, de l’acte et de la représentation de Marat dans sa baignoire par un David sollicité par le député Guirault qui résume dans sa harangue toute la pensée du peuple : Marat n’est plus… Nous ne venons pas chanter tes louanges, immortel législateur! nous venons te pleurer ; nous venons rendre hommage aux belles actions de ta vie. La liberté était gravée dans ton cœur en caractères ineffaçables. O crime! une main parricide nous a ravi le plus intrépide défenseur du peuple. Il s’est constamment sacrifié pour la liberté : voilà son forfait. Nos yeux le cherchent encore parmi vous. O spectacle affreux ! il est sur un lit de mort. Où es-tu David ? tu as transmis à la postérité l’image de Lepelletier mourant pour la patrie; il te reste encore un tableau à faire.  La plume, la feuille et l’encrier, David fait entrer Marat au Panthéon des hommes morts pour leurs idées. Mais si tout le monde connait l’assassinat qui s’inscrit comme un des moments forts de la révolution française, peu connaissent le parcours de Charlotte Corday… Cette chose est réparée ici grâce au talent de Laurent-Frédéric Bollée qui parvient, dans un récit en one-shot réalisé dans la série concept J’ai tué, si ce n’est à éclaircir parfaitement les motivations de la jeune femme, à décortiquer les moyens qu’elle a mis en œuvre pour parvenir à son but. Il le fait en réussissant l’audacieux pari de confronter dans l’au-delà les deux protagonistes de cet assassinat passé à la postérité. Le dialogue qui s’engage entre Marat et Corday donne sa dimension au récit, le scénariste ne se perdant pas dans les méandres d’un contexte historique qui aurait pu se faire envahissant. Ici il donne corps aux idées qu’il rattache à leur portée dans le quotidien des hommes. Olivier Martin au dessin nous immerge totalement dans l’agitation d’une époque charnière de l’histoire de France. D’une précision remarquable, son regard se pose toujours au bon endroit, avec densité et fluidité. Un album qui creuse l’histoire de la révolution française avec ce brin d’originalité qui le singularise, donc essentiel.

Bollée & Martin – J’ai tué : Marat – Glénat – 2016 – 14,50 euros

Les onze mille viergesC’est lors des festivités qui se déroulèrent dans la salle dite Dorée de la Basilique Sainte-Ursule de Cologne en 2010 que Ralf König assiste à une scène des plus étranges. Une théologienne invité à parler de Sainte-Ursule raconte dans les grandes lignes que l’histoire de la fille du roi Maurus, pieuse parmi les pieuses, qui donna son nom à la légende des onze milles vierges, reposait sur bien peu de chose, voire sur rien. Cela titilla tellement le dessinateur qu’il entreprit de faire ses propres recherches à base d’une bibliographie sélective des plus subversives pour présenter sa propre version du mythe. Une version qui pourrait faire grincer les dents des plus pieux lecteurs tant elle met en lumière des mœurs et des pratiques étranges dans une Europe médiévale qui était tout sauf en manque d’idées lorsqu’il s’agissait de faire battre les fouets, s’autoflageller ou assouvir des désirs et des pulsions « interdites ». Ralf König nous porte donc sur les traces d’Ursule fuyant son prétendant pour  préserver sa pureté. Un soir elle dit avoir eu une vision, celle d’un ange à son chevet. Un ange qui lui aurait demandé de se rendre à Rome accompagnée de dix vierges. Chacune devant être elles-mêmes accompagnées de mille vierges… Début de la légende. En fait et pour être précis l’historiographie actuelle attachée à la légende de Sainte-Ursule repose principalement sur un petit opuscule rédigé en latin par l’archevêque de Gênes, un dénommé Jacques de Voragine mais il semble bien que chacun y soit aller de sa version au point de rendre l’histoire bien peu crédible rapporté à cette époque bien trouble du haut moyen-âge. Dans un style bien à lui qui n’a pas peur d’égratigner le mythe mais aussi les représentants de l’église et leur pieux adorateurs, Ralf König livre une version très libre de l’histoire, et à près tout nous aurions tendance à dire : Pourquoi pas !

Ralf König – Les onze mille vierges – Glénat – 2016 – 22 euros

L'homme qui tua Lucky lukeA l’approche d’un village-rue comme il en existe tant dans un far west qui n’en finit plus de drainer hommes et femmes sans attaches, de nuit, juché sur un canasson harassé par une longue chevauchée à travers les montagnes et les forêts alentours, un cavalier brave les éléments. Sur le chemin qui le mène au cœur du patelin il passe devant une pancarte annonçant Froggy town, au pied de laquelle quelques batraciens saluent le cow-boy de leurs croassements. Apposée sur un second panneau de bois placé à proximité du premier une mention semble définir l’ambiance qui règne dans la bourgade : Armes non autorisées. Le cow-boy pas tout à fait fringant poursuit sa route et parvient près des habitations. Il se dirige alors vers un bâtiment qui fait office d’hôtel et de saloon. Il laisse sa monture dans la grange qui s’élève juste à côté de l’entrée principale et donne son nom : Lucky Luke. A peine arrivé dans le saloon il se voit harangué par un jeune homme qui le défie en duel pour « voir comme t’es rapide ». Inconscience de la jeunesse ou bêtise pure ? Lucky Luke ne laisse pas le temps de tirer au téméraire à qui il bloque, honte suprême, le chien du révolver d’un simple cure-dent. Le jeune bougre qui n’est autre que le sheriff du bled se fait désarmer par Lucky Luke. Au même moment entre un autre homme dans le saloon qui n’est autre que le frère du premier. Bien qu’il ne possède pas d’étoile, il veille lui-aussi à ce que la loi, et notamment celle qui oblige les cow-boys de passage à laisser leur arme au bureau du sheriff, soit respectée à Froggy town. Lucky Luke s’y résout tout en mentionnant qu’il viendra la récupérer le lendemain à son départ. Le lendemain avant son départ Lucky Luke voit une délégation de villageois venir à lui pour lui demander de mener l’enquête sur l’attaque de la diligence chargée d’or qui menait le métal précieux à Silver canyon. Après accord du jeune sheriff notre cow-boy solitaire débute son enquête qui semble désigner un coupable trop idéal en la personne d’un indien dont la tête est mise à prix…
Matthieu Bonhomme a fait ses classes dans le western avec réussite dans Texas cowboys sur un scénario de Lewis Trondheim. Deux albums parus en feuilletons à partir de la rentrée 2011 qui dénotaient d’une aisance à se fondre dans le genre. Rien ne laisser présager alors que le dessinateur d’Esteban se laisse convaincre de dessiner son Lucky Luke. Ne s’attaque pas à l’œuvre de Morris qui veut, car l’empreinte laisser par le cow-boy solitaire reste indélébile dans le milieu du neuvième art. Une série qui a bercé plus d’une génération et possède ses propres codes. Le travail de Matthieu Bonhomme passait donc par l’appropriation de ces codes tout en proposant une version typé qui porte sa marque. Le dessinateur y parvient avec une maestria rare. Les codes, dont cet humour omniprésent dans l’œuvre originale, est repris ici notamment dans cette recherche effrénée de tabac par un Lucky Luke littéralement en manque. L’utilisation des panoramiques qui étirent le paysage sont aussi autant de clins d’œil à Morris. Pour le reste Bonhomme livre une copie peut-être plus sérieuse, plus sombre, plus mâture du personnage comme si le héros des gamins que nous L'homme qui tua Lucky luke luxeétions avait grandi et qu’il prenait maintenant conscience de sa force, de ses obligations et de son aura. Un album attendu à juste titre et qui démontre, en dépit de contre-exemples récents, qu’il est possible de redonner vie aux mythes de notre enfance… avec style ! A noter qu’une version luxe très grand format (35 x 46 cm) tirée à 350 exemplaires doit sortir dans les prochains jours. Couverture inédite, cahier graphique de 24 pages couleurs supplémentaires, une affiche géante de 70 x 100 cm et deux sérigraphies trois passages en 30 x 40 cm font de cette édition un must attendu par tous les collectionneurs !

Matthieu Bonhomme – L’homme qui tua Lucky Luke – Dargaud – 2016 – 14,99 euros
Matthieu Bonhomme – L’homme qui tua Lucky Luke – Black and white – 2016 – 195 euros

MacaroniRoméo n’affiche pas une joie débordante lorsque son père l’envoi passer quelques jours chez son grand père à Charleroi. Un grand père qu’il ne connait pas et qu’il catalogue déjà comme un « vieux chiant ». Et pour tout dire le grand-père en question n’a pas l’air vraiment facile, lui qui vocifère sur cette jeunesse qui a oublié la valeur du travail. Le contact sera difficile et prendra corps dans le travail du potager de ce papi envahit de rêves sombres dans lesquels il se souvient des moments forts de son passé. La mine qu’il a connu une fois la guerre achevée dans ce nord de l’Europe pas forcément coloré lui revient de manière récurrente en mémoire, comme le visage de cette femme, Giula, son épouse qui détient un terrible secret, et cette locomotive à charbon qui sillonne les voies vers des lieux inconnus. De son premier jour passé chez son aïeul, le jeune Roméo garde les traces du travail sur ses mains meurtries mais aussi cette prise de contact avec une jeune voisine qui lui révèle le passé de mineur de son grand-père. Et puis il y a aussi cette rencontre avec Mussolini, un porc bien dodu conservé dans une cabane du jardin du vieil homme. Sans vraiment qu’il s’en rende compte, le jeune garçon se trouve happé dans cette histoire familiale, celle qui a vu les « macaronis » venir s’établir en Belgique, devenue terre de promesses. Mais le passé cache aussi des voiles plus sombres qui permettent de mieux cerner le parcours d’un grand-père qui n’a jamais osé dire non…
Le récit construit par Vincent Zabus et Thomas Campi parle d’immigration, des meurtrissures du temps, de la pauvreté qui mène à accepter le sacrifice en pensant que demain sera peut-être meilleur. Il évoque aussi et surtout ce besoin de transmettre, car l’histoire de chacun peut aussi influer le regard des autres. Les deux auteurs abordent ces sujets avec sensibilité, tout en faisant de ce choc des générations un moment de pur partage. Le récit ne se fait jamais bavard, laissant au dessin, qui dépeint avec justesse les expressions des personnages, le soin de densifier les émotions. Les couleurs chaudes et les grandes cases se font enveloppantes pour un récit qui marque et rappelle, s’il le fallait encore, qu’il faut savoir capter les petits riens qui densifient et prolongent le plaisir à côtoyer l’autre. Un message essentiel à la portée universelle.  

Campi & Zabus – Macaroni ! – Dupuis – 2016 – 24 euros

 

Et aussi…

Frapper le solVient tout juste de sortir, le 30 mars chez Actes Sud, Frapper le sol de Céline Wagner, un album qui retrace le parcours de Tatsumi Hijikata, l’homme qui donna naissance au butô dans les années 60. La dessinatrice dit qu’elle n’a pas souhaité en savoir plus sur l’homme que la trace, les nuées, les nimbes qu’il a laissés sur son passage faisant de l’homme un personnage mystérieux dont le parcours étonne encore. L’avant-garde, l’idée d’une création absolue sans contraintes puise dans l’expressionisme européen, dans les auteurs des enfers, Sade, Lautréamont mais aussi Genêt, Artaud, et tout l’expressionisme allemand, influence de la première heure. Pour ce projet Céline Wagner laisse son dessin au noir et blanc pour nous offrir des couleurs qui participent à la mise en scène de la vie de Hijikata.

Nous reviendrons plus longuement sur ce projet dans les prochains jours, avec peut-être une interview de l’autrice. A surveiller de près.


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