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Cris Tales : Le passé est déjà présent dans le futur



Cris Tales est le fruit de deux équipes indépendantes colombiennes : Uncorporated Dreams et Syck. Les développeurs s’étant inspirés de très bons jeux intemporels pour cette production, à l’image de Chrono Trigger, Valkyrie Profile, Legend of Dragoon, Final Fantasy IV et VI ou plus récemment Bravely Default et Persona 5.

Il faut dire que lors de sa première présentation à l’E3 2019, le soft a fait très forte impression, aussi bien auprès de notre équipe, que sur une multitude de personnes présentes durant l’événement. Ce JRPG a rapidement été primé en étant nominé de nombreuses fois dans les catégories « meilleur RPG », « meilleure nouvelle IP », « meilleurs jeux indépendants » et il a également reçu des prix comme le « meilleur jeu indépendant » de WCCF Tech, ou encore du « meilleur jeu PC » de Dualshockers.

Une histoire intrigante jouant sur la temporalité

Le titre reprend l’une des thématiques de Chrono Trigger, celle du voyage dans le temps mais ici cependant, pas de retour à l’ère préhistorique ou même un accès à un univers totalement futuriste. Non, Cris Tales s’inspire certes des plus grands, mais bénéficie de ses propres touches uniques comme la culture colombienne avec des graphismes époustouflants très colorés entièrement dessinés à la main, et un concept de voyage dans le temps (passé, présent et futur) visible d’emblée sur un seul et même écran scindé en trois.

Mais avant d’avoir accès à ces pouvoirs de magicienne temporelle, Crisbell était une jeune fille presque comme les autres. Depuis son enfance et la disparition de sa grand-mère, elle fut placée dans un orphelinat supervisé par la « Mère Supérieure », une femme très gentille et généreuse.

Aujourd’hui, Crisbell vaque à ses occupations et s’apprête à cueillir des roses pour la « Mère Supérieure », mais suite à un vol, elle explore la ville à la recherche du coupable : Matias, une grenouille qu’elle trouve assez rapidement. Mais cette rencontre bouleverse absolument toutes les habitudes de Crisbell, elle qui éveille des cristaux, s’accapare des pouvoirs du « Temps » ainsi qu’une puissante épée.

Grâce à ce pouvoir, la jeune fille, devenue mage temporel, a la faculté de percevoir le passé et le futur, et d’intervenir afin de changer certains passages du cours du temps, et c’est bien ce qu’elle compte faire à la suite du futur sinistre qu’elle discerne : sa ville entièrement détruite. Pour empêcher cette catastrophe et sauver le reste du monde, elle va devoir se battre contre une Impératrice à l’origine de ces prochains malheurs. Crisbell part alors avec Matias et ses nouveaux compagnons Wilheim et Cristopher, deux mages possédant des pouvoirs différents, dans l’espoir de modifier ce futur. Par la même occasion, Crisbell cherchera aussi des réponses sur son propre passé, elle qui n’en a pas eu connaissance…

Utiliser le flux temporel pour changer le cours du temps et des événements et ainsi sauver le monde, deux concepts que l’on voit régulièrement dans les JRPGs. Si l’on découvre une trame classique et efficace, l’ajout de l’axe/flux temporel façon « voyage dans le temps » apporte un véritable plus que ce soit dans la partie scénaristique ou celle du gameplay. Beaucoup de titres vidéoludiques, films, manga/animes ont exploité cette facette « temporelle » : Chrono Trigger, Final Fantasy XIII-2, Radiant Historia, The Tomorrow War, Edge Of Tomorrow, Stein’s Gate,… Là où les changements du présent se répercutent sur un possible futur, alors que le futur même peut parfois avoir des répercussions sur le passé dans l’optique de changer le présent actuel et donc le futur en devenir.

Pour Cris Tales, ces changements sont aussi l’occasion de mettre en avant des personnages principaux ou secondaires, leurs tracas et de multiples sous-intrigues, dont celle de Crisbell que l’on aurait aimée plus profonde et mieux mise en lumière. Mais surtout l’axe temporel permet d’être face à des dilemmes entrainant de petites répercussions à de plus lourdes conséquences, un point positif puisque cela intègre de la rejouabilité qui permettent de voir les différentes fins disponibles selon les décisions prises au cours du soft.

Une base classique et efficace avec en plus trois temporalités visibles en temps réel

Sans posséder une énorme exploration comme certains jeux actuels et leur monde ouvert, le soft reprend une découpe à l’ancienne et limitée. Autrement dit, une World Map desservant des villes, villages, terrains et donjons menant à une transition. Chacun de ces environnements, magnifique pour la rétine, se visite alors en 2,5D avec des parcelles interconnectées entre elles.

Cet aspect traditionnel regroupe également cette exploration classique avec la découverte de coffres, de boutiques et son lot de multiples quêtes annexes limitées dans le temps. Une exploration présente donc, mais assez linéaire avec toutefois un atout de taille : l’empreinte visuelle et ses trois temporalités visibles en temps réel (passé, présent et futur).

Si les débuts peuvent nous perdre face à ce triple mélange, on s’y habitue très rapidement et l’on profite du spectacle avec des dessins entièrement réalisés à la main et en trois fois au minimum ! Nous pouvons ainsi constater l’évolution d’une petite plante dans le passé et la voir devenir un arbre dans le futur, une bâtisse et sa mise en ruines ou encore la jeunesse de certains personnages jusqu’à un âge plus avancé.

Via ce système de temporalité, diverses énigmes assez simples sont aussi de la partie. Pour vous donner un exemple, on peut envoyer Matias dans le passé et le futur pour trouver un élément/objet servant à la résolution d’énigmes, quêtes, ou simplement pour écouter des conversations plus utiles.

En outre, Cris Tales propose également les éléments JRPG connus comme l’accès à divers équipements de protection, l’amélioration d’armements, les boutiques -comme nous l’évoquions tout à l’heure, et l’évolution de nos personnages s’effectuant de manière très traditionnelle, le Level Up octroyant aussi de nouvelles capacités et magies très utiles en combat.

Des combats stratégiques mais aussi très faciles

Parlant d’affrontements, ceux-ci reprennent d’ailleurs les codes traditionnels d’anciens JRPGs, tout en y apportant une dose de modernité. Parmi les bases anciennes, nous retrouvons des combats aléatoires façon anciens Final Fantasy avec des fréquences plus ou moins variables, une fois la transition effectuée, les affrontements sont réalisables en tour par tour régi par ordre de passage entre alliés et ennemis.

Lors du tour de chaque membre de notre équipe, nous avons à disposition la palette habituelle des jeux du genre, c’est-à-dire la possibilité de fuir, d’utiliser des frappes, des magies/capacités spéciales à l’aide de PM servant en outre à exploiter les faiblesses élémentaires/altérations d’états des opposants, ou encore à passer son tour afin de créer des stratégies.

Ces éléments connus ne sont pas les seuls à débarquer, Cris Tales s’appuie même sur une feature un peu plus moderne déjà vue par exemple dans les JRPGs « Mario & Luigi » : la réactivité dans les combats avec des appuis en rythme selon l’enclenchement des frappes. En appuyant au bon moment sur une touche associée, on peut alors encaisser moins de dégâts et octroyer plus de force à nos attaques. Simple et efficace, cette mécanique demande tout de même de rester vigilant(e) en toute circonstance, car sinon les frappes adverses peuvent faire très mal.

Outre ces spécificités, le titre intègre la temporalité dans ces affrontements. De base, chaque affrontement est lié uniquement au présent mais à l’aide de points de CPs spécifiques, Crisbell peut alors invoquer (et désinvoquer) la temporalité du passé sur la gauche de l’écran, et la temporalité du futur sur la droite.

Une idée vraiment sympathique qui offre de multiples possibilités, par exemple en envoyant un ennemi dans le passé ou dans le futur, son visuel diffère en évoluant soit du côté de sa « jeunesse » ou alors de sa « vieillesse », mais c’est aussi l’occasion de le rendre plus faible ou plus fort malheureusement… Mais ces accès aux trois temporalités offrent également d’autres perspectives.

Pour vous donner un exemple, un combattant adverse possède une armure incassable dans le présent, impossible donc de lui asséner ne serait-ce qu’un simple dégât. Pour contourner ce problème, il faut alors utiliser un sort d’eau, comme ça une fois l’armure mouillée, Crisbell envoie ce monstre dans le futur, et là l’armure rouille. De ce fait, les dégâts et frappes fonctionnent de nouveau. Sur le même principe, on peut aussi utiliser l’empoisonnement sur nos opposants, pour ce faire on envoie une jeune plante empoisonnée dans le passé, puis en la récupérant dans le présent elle explose afin d’empoisonner nos adversaires. Mais si dans le présent la plante explose tout de suite pour empoisonner nos adversaires, qu’en est-il dans le futur ? Eh bien l’effet du temps s’accélère et l’ennemi peut même périr instantanément. Avec ce système, les possibilités sont assez intéressantes à déchiffrer, même si l’on aurait aimé davantage de variations dans les situations.

En dehors de cela et de quelques features que l’on vous laisse découvrir, il aurait aussi été judicieux d’avoir accès à plusieurs choix de difficulté pour se compliquer la tâche, en l’état les affrontements deviennent rapidement trop simples une fois les mécaniques bien maîtrisées.

Précisons aussi que le système de sauvegardes est également à « l’ancienne ». Autrement dit, en dehors de quelques lieux spécifiques, la sauvegarde n’est disponible que sur la World Map, ce qui pourra en déranger certain(e)s trouvant la fréquence des affrontements trop élevée.

Somptueux

Esthétiquement parlant, nous nous répétons une nouvelle fois, les développeurs ont dessiné à la main les diverses illustrations (passé, présent et futur) en trois fois minimum, et ce sans compter les différents futurs possibles, tandis que les animations ont été réalisées en image par image. En mouvement, les trois temporalités et les nombreux détails visibles coïncident bien et l’on a vraiment l’impression que le découpage de l’écran n’en forme qu’un seul. Évidemment en restant immobile, c’est tout aussi superbe et soigné.

Ce soin particulier est également présent dans les doublages assez présents du soft, et exclusivement en anglais. La bande-son n’est pas en reste avec Norihiko Hibino aux commandes. Le compositeur est notamment connu pour avoir contribué aux thèmes de la franchise Metal Gear Solid, entre autres mais il n’était pas seul pour cet OST puisque Tyson Wernli s’est occupé de la majeure partie des compositions. Pour Cris Tales, on oscille sur des musiques allant du rock à des sons beaucoup plus orientés sur le lyrique. Là encore, nous sommes face à un travail de qualité.

Testé sur Xbox Series X