Lors de ce Calendrier de l’Avent, je vous ai parlé du mythe de Dracula et comment il redevenait populaire depuis quelques années. Par le biais de rééditions somptueuses ou documentées du texte de Bram Stocker comme celles proposées par les éditions Callidor et Bragelonne, ou par l’intermédiaire d’adaptations immersives telles que celles proposées par Georges Bess ou encore Marco Cannavo et Corrado Roi. Autre alternative, celle de transposer le récit original dans un autre contexte et en prenant des libertés avec le texte original…
Depuis son riche appartement d’Harlem Adrian van Gott écrit une lettre à la femme qui partage ses nuits. Une lettre en forme de testament dans laquelle il va entreprendre de raconter sa vie. De sa jeunesse passée à Venise, dans une sérénissime frappée par diverses pandémies qui devaient emporter son frère et sa sœur, en passant par la Turquie, Paris et maints lieux chargés d’histoire, le jeune homme transporte sa peine, celle d’une enfance passée au sein d’une famille marquée par le deuil et qui ne pouvait plus s’ouvrir à la vie, celle de cette mutation qui, il ne sait comment, devait faire de lui une créature traversant les temps, les époques… Un pouvoir reçu d’un premier baiser qui devait le transformer à jamais. Devenu un vampire, pour survivre, doit voler l’amour des personnes qu’il côtoie, il sèmera le trouble sur son chemin par son mystère et son aura.
Dans Le voleur d’amour adapté du roman éponyme de Richard Malka, Yannick Corboz nous offre un récit superbement mis en images, qui relève le défi d’une écriture tout à la fois fine et précise, teinté d’influences gothiques. Il le fait par le biais d’un dessin au trait délicat et d’une mise en couleurs à l’aquarelle qui rend un hommage appuyé à une Venise dix-huit huitième qui ne s’est pas encore endormie et affiche son raffinement, son architecture et sa sublimation des arts. Autant de piliers qui en font la capitale de la culture européenne. Adrian sera marqué par cette influence, devenant pour occuper les siècles qui passent, un collectionneur avisé. Mais devant cette façade c’est avant tout l’amour qui le maintient en vie et, à sa grande détresse, la perte qu’il cause à ceux qui y succombent. Un récit à la pagination généreuse qui se dévore d’une traite et reste longtemps en tête. Sublime !
Yannick Corboz – Le voleur d’amour – Glénat