Après avoir évoqué hier les biographies de deux joueurs des lignes arrières du XV de France, Pierre Villepreux et Xavier Garbajosa. Nous poursuivons avec deux destins d’hommes du pack, et pas des moindres, ceux qui apportent leur puissance au service de l’équipe et qui permettent de toujours avancer vers la victoire…
Ses plaquages et tampons lui ont valu le surnom de Cartouche, son look celui de Caveman. On le connaît aussi sous ceux de Sea Bass, l’Anesthésiste et parfois même Attila. Il faut avouer qu’avec sa force physique, sa barbe et ses cheveux longs, Sébastien Chabal ne va pas sans nous rappeler des époques révolues, faisant ainsi, même de façon inconsciente, appel à nos instincts les plus primaires. D’ailleurs comme le souligne Lucien Mias, ancien capitaine de l’équipe de France, « Les gens viennent au rugby comme les romains allaient voir les gladiateurs. C’est le combat, la lutte qui les intéresse. Cela touche le cerveau limbique, le cerveau chaud des émotions. ». Mais au-delà de ce combat, de cette « bestialité », il y a des rugbymen et au-delà de cette barbe et de ce look tout droit sorti des cavernes il y a avant tout un homme. Un homme ou tout d’abord un enfant qui vit jour le 8 décembre 1977 à Valence. Les années passent l’enfant grandit et devient un ado. En 1994, pour passer le temps et s’amuser avec ses potes, il commence à tâter le ballon ovale et c’est là que débute un conte moderne où la princesse est barbue et où les fées sont des coaches.
Du terrain de Beauvallon à celui du Stade de France, Sébastien Chabal est un paradoxe à lui seul. Sportif de haut niveau n’ayant rien remporté de majeur dans son domaine, il marque les esprits à tel point que sa popularité dépasse les limites de l’hémisphère nord et même celle du sport ! Alors comment cet homme, inconnu du grand public il y a peine quatre ans, s’est transformé en une valeur sûre pour certains publicitaires ? Qu’est-ce qui fait que, malgré quelques lacunes techniques, l’ancien fraiseur de Crest est devenu l’un des sportifs les plus apprécié dans le cœur des français ? Si vous cherchez des éléments de réponses à ces questions ou si simplement vous faites partie de ceux qui veulent le découvrir, allez alors à la rencontre du sportif, de la star mais avant tout de l’homme en vous plongeant dans la lecture de Humm Chabal de Jean-Christophe Collin.
Jean-Christophe Collin – Humm Chabal – Edition du Rocher/Démocratic books – 2011 – 17 euros
118, c’est le nombre stratosphérique de sélections de Fabien Pelous en équipe de France. Record absolu. Cela force indéniablement le respect. Pourtant rien ne laissait présager cela car, jamais avant lui, un seconde ligne ne s’était imposé avec autant d’évidence à ce poste. Tous les spécialistes, les amateurs de rugby et Pelous lui-même vous le diront : Le deuxième ligne a des travaux de base : Pousser en mêlée, sauter ou soutenir en touche, nettoyer les rucks et défendre. Ils accomplissent ainsi pour l’équipe un rôle essentiel dans l’ombre la plus totale. Il faut vouloir souffrir, se faire mal et violence pour s’imposer dans ce travail ingrat à bien des égards. Alors Pelous pour ne plus verser dans la routine se lançait des défis en sus pour pimenter sa vie d’athlète : Je me suis toujours fixé un objectif supplémentaire à chaque match, à partir duquel j’atteignais une espèce de seuil de rentabilité : une percée et un gros plaquage. Il ne faut pas manquer une occasion de dézinguer un mec. Le un-contre-un, le mètre que l’on gagne ou que l’on perd c’est l’essence du rugby, la matière première du rugbyman. Celui-ci se livre, nu, face à son adversaire, célébrant le mariage de la brutalité et de la finesse du placement, mêlé d’engagement absolu.
Dans ce livre écrit juste après l’arrêt de sa carrière, le joueur emblématique du Stade Toulousain et de l’équipe de France se livre en 118 moments de vie, de coups de gueule, d’émotions partagées. L’homme possède peu de tabous et il réussit avec humour, nostalgie, poésie parfois à construire l’image du rugbyman moderne, lui qui est passé par les derniers jours de l’amateurisme de ce sport. Pelous parle ainsi de ses sélections en équipe de France, des victoires et des défaites, de ses coéquipiers : Califano, Poitrenaud, Dusautoir, Chabal et d’autres encore. Il revient aussi sur les erreurs commises, porte un jugement mi-figue mi-raisin sur Bernard Laporte déjà la tête ailleurs dans d’autres responsabilités, évoque la fameuse lettre de Guy Moquet lue juste avant la défaite contre l’Argentine durant la coupe du monde 2007 ou les récupérations politiques dont il s’est senti victime. L’homme aborde ainsi tous les sujets sur lesquels l’amateur de rugby se posait des questions et il y répond avec une simplicité et une honnêteté rares.
Pelous a libéré son casier dans les vestiaires du Stade Toulousain et rangé ses crampons, il reste pourtant cette montagne qui a apporté, sur une quinzaine d’années (1994-2009), une image qui a fait grandir le sport pour lequel il a tout donné. Un destin unique.
Fabien Pelous – 118 vies – Prolongations – 2009 – 19,90 euros