Il est des secrets gardés de l’histoire. De ceux qu’il ne faut pas forcément dévoiler pour ne pas jeter le trouble sur une Histoire déjà bien nébuleuse voire nauséeuse. La chute de Jeanne d’Arc devant les portes de Compiègne reste un secret de l’Histoire. Pourquoi a-t-elle était abandonnée au sort des anglais ? Pourquoi personne n’a osé défendre celle qui a redonné l’espoir à un royaume mis à mal et qui devait quelques mois plus tard reconquérir ce que de droit ? Pourquoi, vous en saurez d’avantage dans cette histoire qui mêle faits et personnages réels à un récit de fiction plutôt efficace.

En ce dernier volet de la guerre de 100 ans qui avait mis à mal le royaume de France, fragilisé et presque sans espoir de retrouver sa superbe, un rayon de lumière devait s’allumer sur le passage de celle que l’on nomma la pucelle d’Orléans. Orléans, ville qu’elle devait défendre à la barbe des anglais devenus presque souverains du nord ou sud du royaume. Cet épisode devait sans conteste inverser l’ordre d’une guerre amorcée il y a presque cent ans. Un conflit qui avait marqué durablement au fer rouge les esprits et les corps, mais qui n’en était pas à la fin de ses épisodes tragiques. Celle qui avait alimenté l’espoir et permis le couronnement, en juillet 1429, de Charles VII, devait tomber dans une embuscade sous les portes de la cité de Compiègne quelques mois plus tard. La suite nous la connaissons, un procès discutable et discuté, un bûcher pour laver l’affront anglais et l’ingratitude d’un roi prompt à prendre les rênes d’un royaume en souffrance mais peu enclin à lever le doigt pour sauver celle qui lui a permis d’être réinvesti.   

Paris, avril 1435. La pucelle aurait pu quitter les esprits devant la multiplication des succès des armées françaises ou des soulèvements populaires qui entendent bien chasser l’envahisseur anglais. Pourtant le roi de France doit faire face à des bruits qui courent et font de lui celui qui aurait précipité la chute de la pucelle. Des bruits qui le rendraient vite impopulaire s’ils devaient persister. Aussi dans l’anonymat d’un cloître parisien, Yolande d’Aragon demande à deux chevaliers qui ont servis aux côtés de Jeanne d’Arc, Etienne de Vignolles dit La Hire et Jean de Xaintrailles, de découvrir le vrai coupable, celui qui précipita la pucelle sur le bûcher, afin de laver les soupçons qui pèsent sur le Roi. Les deux hommes ont un passé chargé de maitre d’arme, devenus par la force des choses, pillards de chemin, ils acceptent le contrat proposé. Contrat assorti d’une belle caisse de pièces d’or… Lors de cette entrevue avec Yolande d’Aragon un inconnu capé est surpris par les deux hommes qui le prennent en chasse mais l’homme arrive à s’échapper. Quel est cet inconnu ? A-t-il entendu la teneur de la conversation ? Quel danger représente-t-il et peut-il remettre en question la mission assignée par Yolande d’Aragon ? Nous le découvrirons au fil d’un récit qui verra les deux chevaliers se rendre dans différents lieux pour interroger, de manière plus ou moins brutale, ceux qui ont été, proche de la pucelle. Ainsi de Sully-sur-Loire, en passant par Embrun, Compiègne et Tiffauges, nos deux investigateurs rencontreront les principaux suspects. Mais sont-ils sur la bonne piste ?

Avec ce récit qui mêle avec réussite histoire et fiction, Corbeyran nous replonge au cœur d’un moyen-âge sombre fait de manigances et de luttes de pouvoir ou d’influence. La traitrise est monnaie courante et démasquer un suspect devient parfois un tour de force. Le récit le montre dans un univers qui pourrait graphiquement paraître aseptisé mais qui diffuse, par sa noirceur, une ambiance trouble, nébuleuse qui correspond parfaitement au propos développé ici. Un second volet de la série L’homme de l’année qui fait donc mouche !

Corbeyran/Horne – L’homme de l’année : 1431 – Delcourt – 2013 – 14,30 euros