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La BD du jour : Fenêtres sur rue de Pascal Rabaté

Prenons-nous assez de temps pour observer nos voisins ? Pas dans un rapport pervers ou voyeur mais avec l’idée de comprendre et d’apprécier ce qui cultive peut-être nos différences. Pascal Rabaté offre avec Fenêtres sur rue un livre-objet qui amène un nouveau mode narratif, sans parole, sans case, sans page, mais avec pas mal de couleurs et de temps passer à construire les destins des habitants qui vivent dans l’immeuble d’en face…

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FenetresSurRueDepuis la fenêtre d’un simple appartement nous pouvons partir dans une multitude de voyages tous plus saisissants les uns que les autres. Ici un couple qui vit le grand amour au point de l’exposer à la figure du monde, là un accroc de la TV, nuit et jour, qui s’abreuve des univers d’Hitchcock ou de Tati, là un peintre et son modèle qui passent de longs moments à pérorer sur l’œuvre en construction, en bas un bistro où certains riverains aiment se rendre, tout comme un Lavomatix qui le jouxte et devient lieu d’échange et de partage. D’autres fenêtres laissent deviner des destins pas toujours tendres, comme ce couple dont l’homme passe à l’acte ultime et amène au loin le corps de sa femme enroulé dans un tapis de fortune.

L’immeuble construit patiemment par Pascal Rabaté regorge de destins souvent complexes, de personnalités que l’on devine fortes ou faibles mais assurément entières, parfois gangrénées par le doux frémissement du temps qui vient altérer ou magnifier l’image d’un quotidien plus ou moins porteurs d’espérances. De l’autre côté de la rue, le lecteur devient voyeur, ou tout du moins observateur de ce qui se joue devant ses yeux. Sans trop vouloir pervertir son regard il capte des moments futiles qui pourraient paraître insignifiants pris un à un mais qui pourtant sont porteurs de sens lorsqu’ils sont tous réunis.

Pascal Rabaté construit ainsi le décor d’une pièce de théâtre ou d’un film avec fenêtre non sur cour mais sur rue. Un microcosme qui pourrait se limiter à tel mais qui pourtant forme l’image des étapes de la vie avec sa déclinaison de moments-forces qui la pimente sans cesse. L’immeuble qui s’élève au-dessus du Penalty, ce bistro de quartier qui possède assurément une âme, ainsi que les immeubles qui le bordent, offrent ainsi un visage d’une vie de quartier, un peu comme a pu le filmer un Klapitsch, avec légèreté, tendresse et cette envie permanente de donner du sens aux petites choses qui rythment notre quotidien. Les tableaux qui se succèdent ainsi, de jour comme de nuit laissent l’impression que la vie peut aussi s’apprécier dans des moments ordinaires ou communs en apparences mais qui sont riches de sens à long terme. Côté lecteur cela nous offre peut-être cette envie de prendre le temps, de figer l’instant pour en apprécier toute la valeur symbolique. Si notre regard change de perspective, si nous prenons le temps pour observer l’autre peut-être que celui ou celle que nous sommes livrera aussi ses secrets enfouis. Le partage sera ainsi assurément équilibré, la boucle étant bouclée…

Pascal Rabaté – Fenêtres sur rue – Soleil – 2013 – 18,95 euros

 

Interview de Pascal Rabaté

 

 


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