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La BD du jour : L’Ecureuil du Vel’ d’Hiv’ de Christian Lax

Un pistard, c’est ce cycliste acrobate qui frotte dans les virages pris dans des angles vertigineux et qui force l’admiration par les braquets immenses qu’il emmène sur des distances inconcevables pour le commun des mortels. Le pistard c’est aussi un homme avec une histoire, une famille et cette nécessité de composer avec un destin qu’il ne choisi pas toujours…

 

Paris 1940. Premiers mois de guerre. Sam avale les tours sur la piste du Vélodrome d’hiver. Il est cycliste et se préserve, par sa passion, de ce qu’il se passe à l’extérieur. Pourtant, il ne peut fuir la dure loi du temps, qui sur la ligne d’arrivée, gagne toujours la manche. Sa famille, elle, joue avec le feu et manque de sombrer dans des affres bien sombres. C’est tout d’abord la mère qui prend, au travers d’une association de défense des juifs, des risques parfois inconsidérés, c’est le jeune frère handicapé dont la plume assène des articles incisifs contre l’occupant allemand dans des journaux clandestins, se mettant constamment en danger, c’est enfin le père qui fricote avec l’ennemi lors de parties de poker nocturnes dans lesquelles il se laisse plumer régulièrement.

Sam au milieu de toute l’agitation d’une époque trouble va devoir composer avec ces éléments, au risque de mettre sa carrière en difficulté pour des raisons que nous découvrirons au fil du récit. Mais au-delà des histoires personnelles, Lax impose la piste du Vel’ d’Hiv’ comme un des personnages majeur de son récit. Le bois de sa piste ruisselle de la sueur des athlètes qui la parcourent, se tend par la pression des milliers de personnes, juives pour la plupart, qui s’y trouvent amassées avant le départ vers les camps de la mort, résonne encore lors des combats de boxe qui s’y déroulent et permettent l’instant d’un round fantastique de faire vaciller l’ordre et le fascisme si fier par ailleurs. Le Vel d’Hiv c’est aussi l’histoire d’un sport, de bagarres acharnées entre pistards jusqu’au bout de la nuit et au-delà pour la pure et simple gloire, c’est aussi le lieu où le m’as-tu vu fonctionne à merveille pour les bourgeois parisiens qui viennent s’enivrer de son champagne millésimé servit dans des coupes de cristal ostentatoires, c’est enfin le frémissement des tribunes populaires qui dégorgent de passionnés de vélo qui ne manquent jamais une course, un combat, qui permet, le temps d’un bref instant de briser la dureté d’une vie terne, miséreuse et exempte de tout espoir. Le Vel’ d’Hiv’ est entré dans l’histoire pour de nombreuses raisons même si la plus tragique nous revient toujours à l’esprit. Elle a pourtant narguée les autorités lors de paris truqués menés par des officiers allemands avides d’argent pour alimenter leurs parties de poker nocturnes, elle a aussi été lieu de vie et de joie, de tension… et antichambre de la mort.

Le récit de Christian Lax regorge d’humanité mais ne tombe jamais dans la mièvrerie. Alliant avec son talent habituel un solide background tant historique que technique (sur l’univers complexe des courses de vélo sur piste), il parvient à capter notre attention. Ce récit, L’Ecureuil du Vel d’Hiv’ clôt la série en trois histoires sur le thème du vélo (après L’aigle sans orteil et Pain d’alouette). Les personnages qu’il donne à voir, fictifs, prennent de l’ampleur par leurs actes, leurs faiblesses et leur envie de ne pas accepter l’inacceptable. Héros ou antihéros, peu importe, ils donnent à voir l’espoir du changement et amorcent en ce sens leur propre reconstruction face aux destins de la vie…

Christian Lax – L’Ecureuil du Vel’ d’Hiv’ – Futuropolis – 2012 – 15 euros


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