Peut-on revenir de la Grande guerre et reprendre sa vie telle quelle, sans que les douleurs et les cicatrices à peine refermées ne se ravivent au contact de ceux restés au village et qui juge l’homme, son action, ce qu’il est devenu bien malgré lui ? Félix n’aspire qu’à une vie paisible il devra pourtant composer avec les évènements qui bousculent son village et rattrapent le passé… Un suspense haletant offert par Galandon et Dan !
Après bien des troubles, le soldat rentre chez lui. Il n’est plus le même, brisé mentalement par une guerre d’une violence sans commune mesure, ou meurtri dans sa chair par un éclat d’obus qui lui a arraché un bras, une jambe ou la moitié du visage. Les poilus resteront les soldats sacrifiés de la nation. Morts dans les tranchées, leurs noms fleurissent les monuments exposés sur les places publiques de villages qui ont payé un cher tribu à la folie des hommes. Ceux qui ont échappé à la mort sont revenus en héros, titre symbolique, si dur à porter, quoique l’on se méfie parfois de celui qui réussit à échapper aux balles. Comment survivre dans ces tranchées, véritables mouroirs à ciel ouvert ? Comment, si ce n’est en se cachant derrière des abris de fortune, en refusant de monter à l’assaut ou en priant pour que la faux frappe plus à droite ou plus à gauche mais jamais sur soi ? Dès lors, les survivants firent l’objet de questionnements dans des campagnes où pullulaient les veuves… car ils faisaient offense aux morts ou pire défiaient la Mort qui n’avait visiblement pas réussi à parachever son travail de sape. Dans ce climat peu propice à la reconstruction, certains ne devaient jamais retrouver espoir en la vie… Des histoires comme celle-ci furent légion, oubliées par l’artifice du temps qui, à défaut de recoudre les plaies, en efface les plus profondes saignées.
La guerre n’a pas épargné Félix Castelan. L’homme revenu chez lui arbore un masque qui cache une moitié de son visage. Gueule cassée disait-on pour ne pas s’attarder sur une blessure parfois encore ouverte. Dans le premier volet de ce diptyque, l’homme avait débuté son travail de reconstruction. Reconquérir sa femme, son fils, ses proches. Essayer de retrouver goût à la vie, aimer encore et peut-être oublier ces images qui se percutent toujours dans la tête. Chalenge de taille, s’il en est pour cet homme somme toute ordinaire et pourtant si représentatif. Censé être revenu sur des terres paisibles, sa campagne s’agite pourtant peu après son retour. Un homme tue des bêtes au fusil et sème la terreur sur les villageois. Qui est-il, quels sont ses mobiles ? Œuvre d’un agité du ciboulot ou règlement de compte sordide ? C’est à ces questions que devra répondre l’enquêteur Nivoix tout droit dépêché de Paris et qui arbore une réputation à faire frémir les criminels de tout poil. Félix, quant à lui, verra progressivement les regards changer. Il construira pour son fils un engin volant, sorte de montgolfière portée par la seule force du vent qui lui permettra de surplomber la campagne environnante. Cette invention ingénieuse sera une aubaine pour Nivoix qui sollicitera l’ancien soldat pour l’aider à démasquer, du haut de sa nacelle, le criminel qui terrorise la campagne. Pourtant, à trop vouloir mettre en lumière l’origine du mal, on démasque parfois d’autres vérités ou maux cachés plus cinglants et plus durablement inscrits dans les chairs… Un récit force fait de rebondissements qui alimentent et rythment constamment l’intrigue, jusqu’à sa dernière case…
Galandon & Dan – Pour un peu de bonheur T2 – Grand Angle – 2013 – 13,70 euros