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La BD du jour : Rimbaud L’indésirable de Xavier Coste

Il traversa son époque telle une comète, fort brillante mais éphémère. Rimbaud devait renverser Paris, les formes, les structurées littératures engoncées dans des principes lénifiants et chuter dans l’oubli, ignoré de ceux qu’il avait bousculé et qui lui devaient pourtant le repère du vrai, de l’orientation à prendre. Rimbaud l’éclaireur éclairé tombé dans l’ombre, un destin tragique, poétique et assurément magique…

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L.10EBBN001932.N001_RIMBAUDin_C_FRIl ne pouvait braver trop longtemps son époque. Car, encore accrochée au passé et aux formes formalistes, elle ne pouvait supporter l’idée d’être défiée par un minot crotteux tout juste descendu de son Charleville natal. Et pourtant ce qui devait arriver arriva. Le jeune Rimbaud possédait un talent comme on n’en compte peu par siècle, un génie des rimes, des vers jetés, crachés sur la feuille avec l’idée de bousculer son temps, de remettre en question cette merde trop lisse qui n’amuse que les dames de la haute rougissant de leurs qualités révélées. Rimbaud, lui, a mené sa vie comme s’il savait par avance qu’elle ne pouvait durer, qu’elle ne devait durer. Eructant ses vers lors de soirées de lectures entre poètes, buvant jusqu’à plus soif des bières anglaises, de l’absinthe ou tout ce qui lui tombe dans la main puis dans un gosier trop avare pour refuser le peu, il deviendra tout à la fois détesté pour son génie et pour ses manières peu huppées. Des manières d’autant plus insupportables qu’elles révèlent la médiocrité ambiante d’une communauté par trop attachée à l’alimentaire plutôt qu’au flot de vers délurés propres à renverser les conservatismes.

Dans cette biographie épaisse du poète maudit Xavier Coste touche à l’essentiel, décrire un jeune homme en décalage salutaire avec son époque, prompt à s’attirer les foudres du tout Paris par son style de jeune dandy de campagne et sa façon de crier bien haut des vérités trop longtemps retenues dans des œillères de fortune. Verlaine le suivra un temps, à en devenir presque fou, peut-être trop épris pour voir le mal l’envahir tel un cancer, peut-être trop fervent des vers pour se satisfaire de son triste sort d’humilié soumis. Les deux vivront si vite que la chute devenait inéluctable. Le jeu valait-il tout cela ? Tout ce déchainement de vérités criardes à faire lever de leurs étagères poussiéreuses les miséreux poètes de l’oubli ? Sûrement. En tout cas c’est comme cela que l’histoire fut inscrite dans les livres. Xavier Coste ne se contente pas de décrire la seule vie de poète de Rimbaud, il consacre la dernière partie de son récit à ses activités africaines, de chef de chantier, de contrôleur et de commerçant d’armes. Cette partie de la vie de l’auteur, peut-être la moins bavarde, laisse planer ce doute qui parcourt tous ceux qui se délectent des vers du jeune Rimbaud, qu’aurait-il advenu du génie s’il n’avait abandonné sa plume ?

Xavier Coste – Rimbaud L’indésirable – Casterman – 2013 – 22,50 euros


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