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Egypte et Cinéma – Rencontre avec Youssef Chahine
Le maître égyptien

On décolle direction les pyramides pour une petite parenthèse sur un grand cinéaste égyptien, Youssef Chahine, l’un des plus importants de sa génération.

Qu’on se rassure, ici il n’y aura pas de présentation laborieuse et interminable sur la vie du cinéaste, juste quelques notes et dates clefs de sa filmographie.

Youssef Chahine est né en 1926 à Alexandrie. A vingt et un ans, il part étudier durant trois ans l’art dramatique aux USA à Pasadena Playhouse, près de Los Angeles.

A son retour en Egypte, une rencontre avec un pionnier du cinéma égyptien, Alvise Orfanelli (chef opérateur) lui permit de réaliser son premier film Baba Amine, en 1950. Au début de sa carrière, Chahine applique ses connaissances à ses films et s’intègre au cinéma traditionnel égyptien, mélangeant le mélodrame et la chanson tout en s’inspirant de ses influences américaines.

En 1958 il réalise Gare Centrale, considéré comme l’un des films les plus aboutis du début de sa carrière, qui raconte une histoire d’amour impossible entre un petit livreur de journaux et une vendeuse. Avec ce film, Youssef Chahine se démarque de ses premiers films pour dénoncer la pauvreté en Egypte.

A partir de cette période, le cinéaste égyptien utilise son talent pour dénoncer les plaies de son pays, les dérives de son gouvernement (sociales comme religieuses) mais sans pour autant sortir des techniques propres au cinéma oriental (par exemple le zoom rapide sur les comédiens).

En 1984, il séjourne en prison pour avoir diffusé un film interdit par la censure de son pays.

Une fois sorti, retour au cinéma avec des coproductions françaises qui marquent les débuts d’une association de plus de vingt ans avec le producteur Humbert Balsan.

La première de ces collaborations, Adieu Bonaparte (1985) retrace l’histoire du général Caffarelli (joué de manière magistrale par Michel Piccoli) recruté avec quelques soixante chercheurs par Napoléon (Patrice Chéreau dans un grand rôle) pour sa campagne d’Egypte de 1798. Disposant d’un budget colossal pour son film, Youssef Chahine réalise l’une des plus importantes coproductions d’Egypte de l’époque, avec de nombreux figurants, de grandes scènes de batailles, des musiques orchestrales et de superbes costumes. Le tout autour d’un sujet fort : la colonisation.

Autre film important, L’Emigré (1994) qui raconte la vie de Joseph et ses frères. Bien que vu par près de 700 000 égyptiens, le film est interdit par la Haute Autorité Religieuse.

«700 000 personnes l’ont quand même vu, il y a une folie dans la presse, le film est interdit mais on attend l’appel… Il y a l’islam, les islamistes, les intégristes, les extrémistes et puis il y a les fous… De là à faire un martyr, non…» (Youssef Chahine).

 Deux films à retenir par la suite et qui m’ont marqué :

Le Destin (1997), qui a obtenu le Prix de 50ème anniversaire du Festival de Cannes, nous plonge au XIIe siècle en Andalousie, où le philosophe et scientifique Averroès, bras droit du Calife Al-Mansur, se bat contre des intégristes qui utilisent l’islam pour détruire ses écrits. Les disciples et proches du philosophe  décident alors d’en faire des copies et de les passer à travers les frontières.

Ici, Chahine mélange les genres – le film de cape et d’épée et la comédie musicale – et utilise comme toile de fond l’histoire vraie d’Averroès pour dénoncer le fanatisme religieux et l’intolérance qui existe à l’intérieur du monde musulman.

Le sujet peut faire peur, mais le film n’est pas lourd. Chahine emmène simplement ses spectateurs chez Averroès qui nous montre la vie malgré les peurs liées à l’intégrisme religieux. On participe à la fois à des grands repas de famille et des discours sur la liberté de penser mais aussi à des spectacles de chants et de danse (les séquences de chants sont magnifiques et sont à voir en VOST pour mieux comprendre l’importance des textes).

Youssef Chahine signe là un film humaniste (oui, oui !) contre l’opposition à la diffusion du savoir qu’il illustre par une une citation : « La pensée a des ailes, nul ne peut arrêter son envol».

 

L’autre (1999) est un film racontant l’idylle entre Hannane, issue d’un milieu modeste, et Adam, dont la famille est proche du gouvernement. Un Roméo et Juliette égyptien, en somme. Hannane  est journaliste et souhaite dénoncer les méfaits de la mondialisation sur son peuple. Adam désire l’épouser et suivre Hannane dans son combat malgré la présence de Margaret, sa mère presque incestueuse et qui a des projets plus ambitieux pour son fils.

On y retrouve la patte de Chahine, l’utilisation d’un genre populaire, la comédie sentimentale et chantée pour dénoncer une cause, celle de la corruption présente au sein du gouvernement égyptien. Un film qui pointe également du doigt les moyens de communication au service de la mondialisation et plus précisément des américains.

En 2007, Le Chaos fut son dernier long métrage. Youssef Chahine meurt le 27 juillet 2008 au Caire mais bien des choses sont encore à dire sur le réalisateur et l’humaniste qu’il était. Dernier conseil, les films de Chahine (plus de quarante au total) ne sont pas des divertissements du dimanche soir. Soyez en forme pour les voir tant ce réalisateur propose un cinéma important et essentiel autour de l’Egypte qu’il aimait.


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