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La BD du Jour : Les deux vies de Pénélope de Judith Vanistendael (Le Lombard)

Une femme chirurgienne de son état, engagée dans une organisation humanitaire, vient au secours des hommes et des femmes victimes de la guerre. Une femme qui vit loin de chez elle et qui ne trouve pas forcément sa place près des siens. Subtil et magnifié par le trait et le talent de Judith Vanistendael.

Alep, une rue sous les bombes. Du sang sur un corps entre vie et mort. Au milieu, trois hommes le transportent sur une civière, serpentant sur une chaussée jonchée de débris qui freinent la course. Et à l’arrivée, dans un hôpital de fortune fait de tentes déployées dans lesquelles sont alignés des lits de camps, Pénélope passe à l’action. Elle est chirurgien et sauve des vies. C’est son métier et avoue ne savoir faire que ça. Si bien que, lorsqu’elle retourne à la vie civile à Bruxelles, pour revoir les siens, un mari aux petits soins qui s’accommode de ses séjours prolongés dans des pays en guerre, et une fille qu’elle n’a pas vu grandir, elle semble de plus en plus ne plus être à sa place.

Changement de rythme, de contexte, de regard et de perspective. Fragilité des instants et des vies qui basculent en un instant. Le besoin de sauver ce qui peut l’être pour trouver sa place dans un monde qu’elle ne comprend plus. A la faveur d’un retour à Bruxelles Pénélope retrouve sa famille, mais exprime déjà un mal être qui se nourrit notamment de cette relation privilégiée que nouent son mari et sa fille. Une sensation de ne pas être chez soi, de déranger, d’autant plus que tout la rappelle à cet enfant arrivé au bloc après un bombardement, qu’elle n’a pu sauver et qui hante ses pensées. Dans ce contexte la fuite peut-il représenter le seul remède à ce malaise qui l’habite ?

Rares sont les récits qui prennent le temps de s’attacher à l’affect de ses héros, qui exposent, sans sensiblerie, les tensions, les passions, les incompréhensions qui les parcourent. Judith Vanistendael y parvient avec un sens narratif inégalé. La dessinatrice s’attache d’abord à poser un cadre, celui devenu à peine supportable des conflits meurtriers dans des pays lointains dont les enfants n’ont jamais connu la paix. Elle y place une femme qui aime son métier, qui se sent investie d’une mission et qui l’exerce sans arrière-pensée. Puis elle déroule le fil de ses pensées à la faveur de son retour chez elle, dans un Bruxelles si loin du quotidien qu’elle connait depuis des mois. Le choc est frontal. Pas à sa place, la femme tente de faire bonne figure mais sait d’avance que le départ sera la seule issue, comme Ulysse partait pour un long voyage, Pénélope prend ici le relais. Judith Vanistendael le fait dans une proposition graphique en couleurs directes accompagnée de quelques traits. Sobre et efficace pour un récit subtil qui s’attache avant tout à l’humain.

Judith Vanistendael – Les deux vies de Pénélope – Le Lombard


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