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La Loi du Marché : Chronique de la violence ordinaire
Notre univers impitoyable

NOTE DE MaXoE
10Sélection Best Of MaXoE
VOTE DES LECTEURS
1 / 52 / 53 / 54 / 55 / 5
Présenté lundi dans la Sélection Officielle du Festival de Cannes en compétition, et sur nos écrans depuis mardi, le dernier film de Stéphane Brizé est plus que réussi. Il est indispensable.
La Loi du Marché Une Une

La Loi du Marché AfficheUn entretien avec un conseiller Pôle Emploi. Au chômage depuis presque deux ans, un homme cherche à expliquer à son interlocuteur qu’il vient de perdre quatre mois avec une formation n’ayant débouché sur rien. Et son conseiller de lui répondre qu’effectivement, il n’en avait pas le profil. Quatre mois. Et, bientôt en fin de droits, il doit repartir de zéro. Dialogue de sourds. Non pas avec son conseiller qui fait ce qu’il peut avec ce que l’on lui donne. Mais avec l’institution.

Thierry a cinquante ans et se retrouve au chômage suite à un licenciement économique. Il lutte. Contre l’entreprise l’ayant licenciée alors qu’elle faisait des profits. Pendant un temps. Contre Pôle Emploi qui s’acharne à lui proposer des formations n’aboutissant à rien. Contre sa banque qui lui suggère de vendre son appartement. Pour que sa famille survive, tout simplement.

Thierry retrouve du travail. Il est engagé comme agent de sécurité dans un magasin de grande distribution. Chargé de repérer les délits des clients. Mais également de surveiller ses collègues. Oui, le patron veut licencier pour augmenter les bénéfices du groupe. La loi du marché. Marche ou crève.

La Loi du Marché Deux

Pas de pathos (ou si peu). Pas de misérabilisme. Pas de surenchère. Juste la réalité simple et glaçante de ce combat ordinaire. Celui d’un homme qui se heurte à la violence de la société. Du marché. Du capital.

Tourné à la manière d’un documentaire, La Loi du Marché rappelle l’émission Strip-Tease. Une caméra mouvante. Des gros plans, avec beaucoup de prise de profil et de dos. Et de longues scènes filmant des « moments » pris dans le parcours du personnage principal. Des moments qui, d’un premier abord, paraissent banals, mais qui révèlent en fait toute la violence, toute la cruauté du système.

Le parti-pris est celui du naturalisme. Car tous les acteurs sont des non-professionnels, jouant pour beaucoup leur propre rôle : un conseiller Pôle Emploi, une banquière, des employés de supermarché, un DRH. Et tout ceci donne encore plus de crédibilité au propos. Toutes les hésitations sont là. Celles du quotidien. Calculées, ou non. Seul acteur professionnel : Vincent Lindon. Qui réussit à se fondre dans la masse tant il est naturel. Son jeu est puissant. Dans ses silences, sa souffrance. Jamais excessif. Toujours à l’économie.

La Loi du Marché Trois

La Loi du Marché n’est pas un film militant. Mais il est engagé. Il n’a pas besoin d’être militant pour dénoncer. Il met seulement le doigt là où ça fait mal. En montrant que non, les chômeurs ne sont pas des « parasites » ou des « assistés » (ce que l’on entend régulièrement dans les discours politiques et de plus en plus fréquemment chez le citoyen lambda), mais bien des hommes et des femmes qui font tout pour se sortir de cette situation. Ce qui est un combat de chaque instant tant le système joue contre eux. Combat de chaque instant pour retrouver du travail. Et également combat de chaque instant pour le garder une fois retrouvé. Car la lutte continue. La lutte contre une banque qui – après avoir proposé au chômeur de vendre son appartement et d’investir son capital dans une assurance décès – invite l’ancien chômeur ayant récemment retrouvé un emploi à souscrire à un crédit. La lutte aussi contre sa conscience lorsque l’on demande à l’agent de sécurité de dénoncer sa collègue caissière pour quelques bons de réduction mis dans sa poche parce que les clients n’en voulaient pas. S’il ne le fait pas, il perd son emploi. S’il le fait, c’est elle qui perd son emploi.

C’est la perversité du système que ce film a voulu démontrer. Et il le fait extrêmement bien. Avec beaucoup de justesse. De sobriété. La seule chose que l’on pourrait reprocher au réalisateur est d’avoir enfoncé le clou avec le personnage du fils handicapé de Thierry. Le contexte difficile – se suffisant déjà à lui-même – n’avait pas besoin d’être autant accentué.

Réalisé avec des moyens dérisoires, ce film est une prise de risques comme on en voit peu aujourd’hui. Qui fait du bien malgré sa violence morale. Et qui mériterait d’être vu par tous.

NOTE MaXoE
10Sélection Best Of MaXoE
VOTE DES LECTEURS
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A diffuser au plus grand nombre, notamment dans un but pédagogique. Histoire de ne pas perdre de vue que ce qui ne fonctionne pas, c'est le système. Et rien d'autre.
ON A AIMÉ !
- Le sujet
- La mise en scène naturaliste
- La prise de risque
- Vincent Lindon
ON A MOINS AIMÉ...
- Avoir accentué le contexte difficile avec le fils handicapé
La Loi du Marché : Chronique de la violence ordinaire
La Loi du Marché
Support(s) : Cinéma / DVD
Réalisation : Stéphane Brizé
Scénario : Stéphane Brizé et Olivier Gorce
Casting : Vincent Lindon, Yves Ory, Karine De Mirbeck, Matthieu Schaller, Xavier Mathieu, ...
Durée : 1h 33min
Genre : Drame
Sortie en France : 19/05/2015
Distribution : Diaphana Distribution
Production : Nord-Ouest Films et Arte France Cinéma

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